Alors que le débat sur la réforme des institutions fait rage, un autre grand chantier se profile à l'horizon. Mais à pas feutrés. Il concerne pourtant la refonte de la carte électorale des circonscriptions, celles de l'Assemblée nationale. C'est Jean-Louis Debré, président en titre du Conseil constitutionnel, qui s'y est collé. Résultat : une réflexion pertinente. En revanche, pour le Sénat, c'est le sur place.
En effet, de l'autre côté, le gouvernement met de gros verrous à toute avancée sur la nécessaire réforme du mode de représentation au Sénat. Et s'obstine ainsi, en dépit du bon sens mais dans son intérêt bien compris, à vouloir maintenir une forte réprésentation de la campagne, une campagne qui s'est pourtant dépeuplée en migrant inexorablement vers la ville.
Le principe démocratique de l'alternance politique n'est donc pas possible tant que les sénateurs ruraux seront plus nombreux que leurs collègues urbains.
Pour l'Assemblée, le Conseil constitutionnel a rappelé l'impératif de ce redécoupage (*). Après dix mois et quelque 1.100 réclamations ou saisines jugées, il a arrêté les "observations relatives aux élections législatives de juin 2007". Revenant sur le déroulement du scrutin et les règles qui le conditionnent, les Sages préconisent aussi une clarification des règles de financement des campagnes.
L'observation la plus contraignante concerne le redécoupage des circonscriptions. "L'Assemblée nationale, rappellent-ils, doit être élue sur des bases essentiellement démographiques". Or, l'actuelle carte électorale repose sur les données du recensement de 1982. L'évolution de la démographie française "a mis en lumière des disparités de représentation peu compatibles" avec le principe d'égalité des citoyens.
"Il est désormais impératif de procéder à ce découpage", conclut le Conseil. Pour preuve de cette urgence, Debré et les Sages relèvent que 461 arbitrages examinés après le scrutin 2007 concernent le découpage. Ces dossiers ont d'ailleurs fait exploser le nombre de réclamations, qui passe de 162 en 2002 à 592 en 2007. Tous les contentieux relatifs au découpage ont été rejetés, y compris quand l'écart de population des circonscriptions au sein d'un département approche du simple au double.
Mais le législateur est prévenu : le Conseil ne pourra pas transiger plus longtemps avec le principe d'égalité devant le suffrage. Jean-Louis Debré s'est également montré attentif à l'impact des nouvelles technologies sur les scrutins. Les Sages demandent que le démarchage téléphonique, les SMS et MMS, Internet soient encadrés par la loi électorale. Le Conseil met par ailleurs en garde contre les incidents qui ont émaillé l'utilisation des machines à voter électroniques : leur répétition peut "accroître la réticence psychologique des électeurs".
Le Conseil constitutionnel profite enfin du 20e anniversaire de la loi sur les comptes de campagne pour accorder un large satisfecit au dispositif "qui a pleinement atteint (ses) objectifs". Peut-être trop bien, puisque les Sages demandent quelques assouplissements.
A l'examen des 507 saisines de la commission nationale des comptes de campagne, le Conseil s'interroge sur "la nécessité des sanctions" contre un candidat qui aurait réglé directement de menues dépenses quand la loi prévoit que seul son mandataire peut le faire. Les Sages jugent par ailleurs disproportionnée l'inéligibilité qui frappe les manquements aux règles de financement : "Cette sanction est beaucoup plus sévère que celle qui s'applique à un candidat dont l'élection a été annulée à la suite d'une fraude ou d'une manœuvre condamnable."
A cet égard, le Conseil cite en exemple le cas de Georges Fenech, député UMP du Rhône, frappé d'inéligibilité : les Sages, qui ont confirmé l'infraction, ne remettent en cause ni sa "bonne foi" ni sa "sincérité". Il y a deux semaines, c'est Raymond Durand, son suppléant qui a été élu au second tour de la législative partielle.
(*) Source : Le Figaro du 30 mai 2008
Pour y voir plus clair sur les enjeux de la réforme des institutions,
Une excellente analyse du projet sur les institutions :
http://contrejournal.blogs.liberation.fr/mon_weblog/2008/05/gouverner-cest.html
Les principaux points du texte adopté : http://www.lemonde.fr/politique/article/2008/06/04/reforme-des-institutions-les-principaux-points-du-texte-adopte-par-les-deputes_1053435_823448.html
5 bonnes raisons d'être contre :
http://contrejournal.blogs.liberation.fr/mon_weblog/2008/06/rforme-des-inst.html