Mardi 3 novembre : Le docteur Patrice Halimi réagit à ma question de fin d'article et exprime son point de vue. A lire dans les commentaires.
Pour comprendre pourquoi le projet d'implantation de la polyclinique Rambot au Montaiguet est tordu, il ne faut pas en rester à la seule délibération de révision simplifiée de POS que le conseil municipal examinera demain soir. La manœuvre proposée doit être dénoncée en prenant en compte le large contexte dans laquelle elle s'inscrit.
D'abord, le contexte des choix politiques de cette municipalité. Cela fait plusieurs années que Maryse Joissains retarde la mise en place du Plan local d'urbanisme cherchant tous les prétextes : manque de fonctionnaires pour travailler sur ce type de document, attente de décisions censées être prises par l'Etat, temps électoral, annulation de l'élection. Or, de nombreuses communes, petites et moyennes, de la CPA ont déjà adopté leur PLU. Comment ont-elles réussi avec moins de moyens que ceux de la Ville d'Aix ?
Joissains s'est donc retranchée dans un recours systématique et au coup par coup à des révisions simplifiées de POS parachutées ici et là sans réflexion globale sur les besoins en équipements et infrastructures et les équilibres nécessaires à un développement maîtrisé et harmonieux du territoire. C'est d'ailleurs ce qu'ont bien compris et consigné les CIQ, les associations et bon nombre de contributeurs qui ont participé à l'enquête sur la révision de POS des Bornes. La confirmation de cette mauvaise méthode municipale en sera encore fournie demain puisque l'ordre du jour comporte une douzaine de dossiers liés à la planification urbaine.
Plus politiquement, depuis huit ans, les adjoints successifs à l'urbanisme se sont pliés à la pratique de la prise de décisions dans leur coin faisant fi de concertations approfondies avec la population et les CIQ. Demain, il sera intéressant de savoir combien d'élus de la majorité voteront en toute connaissance de cause. Il est à craindre qu'ils ignoreront tout sur le sujet et qu'ils feront aveuglément bloc derrière le maire en ne se posant aucune question.
Remettre le projet dans son contexte
Dans un second temps, le projet doit être replacé dans son contexte historique. En effet, le projet de restructuration de la clinique Rambot ne date pas de la récente révision de POS. Il faut remonter à 2004 pour se rappeler qu'un protocole d'accord avait été conclu entre la polyclinique et la Semepa, avec accord de la Ville, pour construire un immeuble médical permettant son expansion en proximité immédiate de l'établissement existant sur un parking municipal de 280 places (maintenant ouvert).
D'ailleurs, en 2005, ce projet initial avait donné lieu à une révision partielle de POS confirmant l'orientation médicale du quartier et fait l'objet d'un permis de construire permettant de développer globalement 5.000 m² de structure médicale modernisée et adaptée à la mise en place de l'offre de soins répondant aux besoins de Rambot qui devait bénéficier dans cette structure de 3.500m².
Ceci pour dire que le projet devait se faire sur place. Or, en totale contradiction avec ces démarches, en novembre 2007, la municipalité a lancé une révision expresse de POS au lieudit Les Bornes pour permettre un déménagement prochain de la polyclinique. Si, en 2008, l'ARH (Agence régionale d'hospitalisation), devenue il y a peu ARS (Agence régionale de santé), a donné son accord pour ce transfert, l'agence s'est bien gardée de lui apporter les moindres fonds au titre du plan de financement Hôpital 2012.
On devrait se demander pour quelles raisons. Par exemple, pourquoi, en passant du site actuel à celui du Montaiguet, le nombre de lits a-t-il crû de 319 à 340, outrepassant donc les objectifs du projet initial, au mépris même de l'équilibre privé / public ?
Délais, faisabilité et financement
Enfin, deux autres aspects méritent d'être analysés avec sérieux.
La question des délais et de la faisabilité : les porteurs du projet annoncent dans leur féerique plaquette que la livraison est prévue à l'horizon 2011 avec transfert en juin 2012. Pourtant, au mieux, le permis de construire ne pourrait pas être déposé et délivré avant 2010. Il faudrait 2 ans pour voir naître les infrastructures d'accès, publiques ou financées par la polyclinique et 3 ans pour la construction de l'établissement lui-même.
Cela mènerait à 2015… si aucun recours ne devait entraver le processus. Or, il y a fort à parier que de multiples procédures seront engagées devant les tribunaux. Ce qui fera tomber l'autorisation de l'ARH valable jusqu'en 2012.
Le portage et le financement : depuis une dizaine d'années, la polyclinique actuelle n'a enregistré aucun bénéfice et n'a par conséquent pas pu enrayer le délabrement de l'établissement mettant en péril le respect de certaines normes. On a du mal à imaginer des apports de fonds des grands opérateurs hospitaliers privés qui, pour diverses raisons dont la crise, ont du mal à investir dans leurs établissements existants.
Or, le coût minimum pour un projet tel que celui des Bornes va chercher dans les 80 millions d'euros, hors les dépenses d'aménagements de voirie, de ronds-points et de réseaux. Rien de tout cela n'a été chiffré, ni par la polyclinique ni par la Ville pour les parts respectives qu'elles comptent prendre en charge. La crise financière ne va certainement pas aider, d'autant que la polyclinique avait sollicité l'ARH à hauteur de 45 millions d'euros, qui lui ont été refusés !
La municipalité avance-t-elle les yeux fermés ? Quelles garanties a-t-elle prévues avant de valider ce vaste projet de restructuration d'une zone foncière protégée qui doit éviter l'écueil du purement spéculatif ? A-t-elle pris conscience qu'un tel projet ne peut se concevoir que dans le cadre d'une stratégie d'intérêt général reposant sur une vision globale sur l'ensemble du territoire de la commune ?
On le voit, les questions ne manquent pas. Mais, nous donnera-t-on des réponses ?
PS : Incidemment, il serait intéressant de savoir aussi comment le docteur Patrice Halimi peut à la fois se faire l'ardent défenseur de la cause environnementale et sanitaire et, concerné parce qu'exerçant au sein du regroupement Rambot-La Provençale, soutenir un projet si mal engagé dans un secteur naturel qui risque de souffrir gravement d'un point de vue écologique.
(Clic sur l'image pour agrandir) L'article de La Provence du 31.10.2009