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Dessin de Charb dans Charlie Hebdo
C'est la criiiiise ! Au menu : confiture sur tartines beurrées pour les uns, soupe bien coagulée pour les autres. Ce week-end, on en a entendu de toutes les sortes. Le sauve-qui-peut venu des Etats-Unis a atteint l'Europe. Les réunions se succèdent à un rythme effréné. L'objectif principal est autant de rassurer le populo que de lui fiche la trouille.
Rien de contradictoire là-dedans. Il s'agit de montrer que nous sommes gouvernés, que le pouvoir garde son sang-froid tout en nous insinuant l'ordre de nous tenir tranquilles. Sinon, au premier mouvement d'humeur, nous risquons de perdre boulot, salaire, épargne… Vu le chômage en hausse, les déficits abyssaux, la récession et, donc, vu la misère ambiante, nous avons intérêt à fermer notre gueule.
Car, qu'on se le dise, il faut que l'escroquerie soit endiguée par le recours à l'argent public, coûte que coûte. Il faut sauver les malfrats auteurs du hold-up géant, ces financiers dorés sans scrupules qui restent les bienfaiteurs de l'humanité. L'opération enfumage peut très bien réussir. Le gouvernement et le Medef usent de tous les moyens qu'ils contrôlent pour nous faire gober la soupe en magma. Les chaînes de télé, sources d'information les plus matraquantes auprès du grand public, se relaient pour souffler le froid et le chaud de la communication "officielle".
Comme par hasard, ce week-end a paru un sondage du Journal du dimanche sur le travail dominical en même temps qu'une interview du secrétaire d'Etat à l'industrie et à la consommation, Luc Chatel. Le JDD appartient au groupe Arnaud Lagardère, grand copain de Nicolas Sarkozy. Le sondage est produit par le groupe Ifop dont la PDG est Laurence Parisot, grande copine des deux autres. Illico, tous les médias buvant à la même fontaine d'eau brute reprennent l'info.
Et que prétend donc ce sondage ? Que "67% des Français accepteraient de travailler le dimanche si c'était davantage payé qu'en semaine". Oh ! La bonne nouvelle que voilà ! Quelle surprise ! Pourtant, dans le détail, on apprend que sur les 1.003 personnes interrogées, seulement 17% répondent "oui, toujours" et 50% "de temps en temps". Premier étonnement : n'y a-t-il que des Français qui travaillent en France ? Deuxième étonnement : que veut dire l'expression "de temps en temps" ? Est-ce trois ou quatre fois par an ? Est-ce deux fois par mois ? Est-ce seulement lorsque l'occasion se présente ou que c'est très bien payé ? On n'en saura pas plus. Le lavage des cerveaux aura opéré à merveille.
La seconde question du sondage portant cette fois sur l'ouverture des magasins le dimanche a peu été reprise par les médias. Pourtant ! On y entend un autre son de cloche. 52% sont favorables et 48% sont contre. Sur le site du gratuit 20minutes, sur le même thème, un autre sondage de ce dimanche comptabilisant en fin de soirée 5.578 votants spontanés montre qu'il n'y a que 26,78% des répondants pour qui le travail du dimanche "c'est bien, cela permet d'arrondir ses fins de mois". Pour 37,38%, "c'est de l'exploitation pure et simple" et pour 12,82%, "pas question de travailler le jour du Seigneur" (sic). Total : 50,20% défavorables. Et 23,02% déclarent que "c'est pratique, on peut faire ses courses toute la semaine".
Ces chiffres ne feront bien sûr pas la une… Seule la manipulation écrasante de l'Ifop servira de caution. Pour mémoire, il y a un an, Laurence Parisot disait vouloir clarifier les magouilles de la caisse noire de l'IUMM et mettre de l'éthique (on ne rit pas, s'il vous plaît !) au sein du Medef. On attend toujours… De même, Nicolas Sarkozy voulait dépénaliser le droit des affaires. Puis, il s'était fendu d'un discours stigmatisant les parachutes dorés, s'engageant à légiférer sévèrement. On attend toujours, aussi…
Samedi soir, en direct sur France 2, la présidente patronale répétait qu'elle ne veut pas de loi, des recommandations suffiraient, pour encadrer les débordements faramineux des chefs d'entreprise, estimant qu'elle fait confiance au bon sens et à la morale de ses collègues (on ne ricane pas, s'il vous plaît)… Vu le culot des gros bras de la finance mondiale en général et française en particulier, il y a peu de chances qu'une autorégulation se mette en place et soit respectée.
Pour conclure, et ce sera là enfin l'occasion de rire, on peut lire ceci sur le site de l'Ifop : "L'Ifop s'appuie sur l'expérience, cultive l'imagination, encourage l'innovation. Les femmes et les hommes de l'Ifop agissent à chaque instant avec honnêteté et transparence. Le respect du client est au cœur de leur éthique, sa satisafction au cœur de leur mission". […] "Nous aimons inventer, découvrir, déchiffrer." […] "Notre regard sur ce qui nous entoure n'est à nul autre pareil". […] "70 ans d'esprit pionnier et de décryptage de l'opinion publique, ça se partage."
On ne peut pas mieux tromper…