Blogueurs, vos papiers !
Un sénateur se disant "apolitique sans étiquette" (mais un peu de droite quand même, exclu de l'UMP en 2004 pour candidature dissidente aux régionales), le dénommé Jean-Louis Masson, a déposé le 3 mai une proposition de loi visant à mettre fin à l'anonymat des blogueurs professionnels ou pas. Il propose donc qu'obligation soit faite à chaque blogueur de mettre "à la disposition du public […] nom, prénom, domicile et téléphone".
Ce brave parlementaire n'en est pas à sa première plaisanterie. Dans le domaine de l'Internet, c'est, pour ainsi dire, un récidiviste.
C'est déjà lui qui voulait soumettre à la redevance audiovisuelle ceux qui regardent la télévision sur leur ordinateur. C'est encore lui qui voulait élargir la responsabilité pénale de tous les intervenants, hébergeurs de sites, responsables de sites et auteurs d'allégations diffamatoires.
Aujourd'hui, son intention est de "mieux protéger les éventuelles victimes de propos inexacts, mensongers ou diffamatoires qui sont de plus en plus souvent colportés sur la toile" et, à ses dires, par une nouvelle espèce qui s'est développée de manière exponentielle, celle des non professionnels blogueurs et éditeurs des sites Internet, alors que, il ne peut l'ignorer, ces personnes malfaisantes sont déjà pénalement et civilement responsables de tous leurs propos et de l'ensemble des éléments qu'ils éditent.
L'intrépide sénateur a sans doute voulu ravir la première place à l'imaginatif Frédéric Lefèbvre, concurrent bien difficile à doubler en hurluberlutudes. Car pour bien faire, ledit sénateur n'aur
ait pas dû arrêter là ses inepties.
A tant faire, il fallait aussi réclamer date et lieu de naissance, nationalité, situation familiale, numéro de sécu, code de carte bancaire, et même, y a pas de raisons de s'en priver, toutes mensurations physiques. Et bonjour les nouveaux fichiers !
En réalité, la farce du sénateur ressemble un peu à du vent. En effet, la loi permet déjà d'identifier les blogueurs car les fournisseurs d'accès connaissent leurs coordonnées. Quiconque se prétend diffamé peut demander réparation en justice avec l'assurance de se retrouver au tribunal en présence d'une personne en chair et en os, et non devant un fantôme insaisissable de corbeau.
En définitive, ce qui est en jeu ici, c'est la mise en question de la prise de parole par des citoyens ordinaires.
Si, personnellement, j'ai fait le choix d'afficher clairement mon identité, je ne vois pas au nom de quoi je devrais condamner ceux qui souhaitent user de leur liberté via l'anonymat.
La proposition de loi :
http://www.senat.fr/leg/ppl09-423.html
Appel et pétition pour le droit à l'anonymat sur Internet :
(j'ai signé)
http://www.wikio.fr/article/appel-defense-droit-anonymat-internet-190719788#news190719788