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le Blog de Lucien-Alex@ndre CASTRONOVO
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10 mars 2011

Alexandre Guérini voulait aussi contrôler l'OM !

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On ne l'a lu nulle part encore. Et c'est le Ravi qui le révèle ce mois-ci. Alexandre Guérini rêvait aussi de ballon. Ben, depuis trois mois, on peut dire qu'il s'y est mis tout seul, au ballon. Désolé pour ce relâchement, mais comment résister à cette raillerie coluchienne. Lisez plutôt…

               Quand "Monsieur frère" rêvait de contrôler... l'OM
Les premières écoutes de l'enquête sur des marchés publics supposés frauduleux dans les Bouches-du-Rhône montrent que l'interventionnisme d'Alexandre Guérini était protéiforme.
"Incontrôlable." Pour certains socialistes marseillais, l'affaire dite "Déchets 13", dans laquelle Alexandre Guérini est mis en examen et incarcéré depuis trois mois, a au moins une vertu : les débarrasser d'un personnage trop encombrant.
Clientélisme effréné (attributions de logements, d'emplois, de subventions), interventionnisme dans les marchés publics à son profit et dans le fonctionnement des collectivités gérées par la gauche, etc., le frère de Jean-Noël, sénateur et président socialiste du conseil général des Bouches-du-Rhône, ne s'est effectivement rien interdit depuis la prise de la Communauté urbaine de Marseille par le PS en 2008.
En juin 2009, "Monsieur frère" décide par exemple de prendre en main l'avenir de l'Olympique de Marseille. Président du club depuis quatre ans, Pape Diouf est proche de la sortie. Le 17 juin, jour de son licenciement, Alexandre Guérini, visiblement mal informé, envoie un SMS à un ami. "Il faut lier la privatisation du stade au départ de Diouf, téléguidé par l'indic en accord avec Dreyfus [Robert Louis-Dreyfus, actionnaire majoritaire de l'OM, Ndlr] qui, en devenant propriétaire du stade, peut vendre plus vite et plus cher. Pour l'indic, il faut absolument dégager Anigo [truculent directeur sportif du club, Ndlr] et Diouf pour avoir les supporters avec lui", explique très sérieusement l'homme d'affaires spécialisé dans les déchets.
Amusé par la nouvelle lubie du cadet des Guérini, son interlocuteur l'asticote lorsque l'entrepreneur lui apprend la mort de RLD, début juillet. Après l'avoir fait mariner, il lui lâche le nom du successeur de l'homme d'affaires suisse : "Molitor", un ancien international rangé des circuits depuis des lustres. Réponse d'Alexandre : "Va…" Finalement, Jean-Claude Dassier, un ancien de TF1, prend la tête du club, le stade reste propriété de la mairie et José Anigo amuse toujours autant avec ses analyses d'après match. Imperturbable, le frère du patron des socialistes marseillais réclame le maillot de l'Argentin Lucho Gonzalez, tout juste débarqué. L'histoire ne dit pas s'il obtient satisfaction au moins sur ce point…
Même enthousiasme et même réussite d'Alexandre Guérini à propos du rachat de La Chaîne Marseille. A la même période, la télé locale est, elle aussi, en pleine turbulence. Actionnaire majoritaire, la Société générale souhaite se désengager. Là encore, l'entrepreneur s'immisce dans le dossier. Le 26 juin, un de ses amis l'appelle et lui annonce : "Le déj' s'est très bien passé dans le sens dont on avait parlé. X […] n'a pas dit qu'il connaissait Jean-Noël. Seulement qu'il l'a rencontré une fois rapidement. Mec discret, proche de l'OM, parle d'une mutualisation entre l'OMTV et LCM… Prêt à contribuer au tour de table […]."
Las, son poulain n'y participe pas. Droit au but ! Mais totalement hors jeu…
                                                                            Jean-François Poupelin

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8 mars 2011

Ça castagne fort entre Montebourg et Guérini

montebourgLe moins que l'on puisse dire, c'est que ça castagne.
Arnaud Montebourg récidive et publie cette fois une lettre ouverte à Martine Aubry (voir le texte intégral ci-dessous). Il ne retire rien de ce qu'il a dit dans son rapport sur la vie de la fédération socialiste dirigée par Jean-Noël Guérini. Au contraire même. Sous un ton qui se veut courtois mais tueur, il en rajoute quelques couches, assurant pouvoir prouver l'ensemble de ses dires.
Alors, vexé, l'assailli réplique aussitôt par une seconde plainte, pour diffamation.
En parallèle, arrive un autre tir. Dans une interview accordée au JDD, un dissident socialiste, Philippe San Marco, se réjouit du rapport Montebourg sur les méthodes de Guérini, déclare en avoir vu un peu trop depuis trop longtemps et met lui aussi des "poings" sur les "i" du nom Guérini (voir en bas de cet article).
Le site Marsactu titre sur "les tartuffes de la rue Solférino". Et le site Agoravox cherche à savoir comment le rapport a bien pu fuiter (voir les deux liens en fin d'article). Quant à l'émission C dans l'air d'hier sur France 5, le sujet était intitulé "Marseille : linge sale en familles".
Il y a donc bien malaise au Parti socialiste. Et cela à seulement deux dimanches des cantonales. Le tout dans une ambiance générale rance avec le procès Chirac et le ramdam sur des sondages censés prédire une élection pestilentielle.
Il ne manque plus que l'annonce par un illuminé d'une fin du monde imminente. A qui se fier pour redresser la barre et régénérer au moins un peu l'air républicain ? Le printemps pourra-t-il à lui seul dépolluer l'atmosphère ? Et si on tirait les cartes pour voir ?

(Clic sur l'image pour agrandir)
guerini_creseveur

                       Madame la Première Secrétaire, ma chère Martine,
aubryJ'ai préféré garder jusqu'à présent le silence après la publication malheureuse et inappropriée du rapport que je t'avais exclusivement et confidentiellement destiné au mois de décembre, afin de ne pas ajouter au risque de confusion.
Mais la façon dont les dirigeants qui t'entourent et toi-même s'emploient à discréditer mon travail sans condamner d'invraisemblables comportements au sein de la Fédération des Bouches du Rhône me paraît autant désolante que blessante. Cette publication a en outre péniblement interféré dans la campagne pour les élections cantonales que je mène en Saône-et-Loire comme dans d'autres départements.
Ce rapport était ma dernière transmission dans le cadre de mon travail de Secrétaire National à la Rénovation que tu m’avais confié, avant de partir en campagne pour ma candidature dans les primaires de la gauche.
Ce document est né d'une visite à Marseille le 5 juin 2010 afin de présenter aux militants marseillais le programme de rénovation du parti que nous avons adopté ensemble, contenant outre l'organisation des primaires, la fin du cumul des mandats pour nos parlementaires et l'instauration d'une autorité éthique -c'est l'ironie de la situation- au sein du Parti Socialiste. A l'occasion de cette visite de terrain, de nombreux élus et militants marseillais se sont ouverts à moi de faits les plus condamnables et effrayants qu'ils m'ont relatés dans le détail au sujet de cette Fédération et m'ont littéralement supplié de m'en emparer, de t'en avertir, et d'agir au nom de l'honneur du socialisme.
J'ai jugé en conscience, au regard des responsabilités que tu m'avais confiées pour rénover et transformer le parti, au regard de l'exigence et de la rigueur que j'attache toujours à l'exercice de celles-ci, dans le souci de protection des militants et élus des Bouches-du-Rhône sincères et honnêtes, exposés aux méthodes abusives et dangereuses qui m'étaient rapportées, qu'il était de mon devoir de le faire dans l'intérêt de la gauche et de sa réputation morale.
Tu comprendras sûrement que la Rénovation du Parti socialiste ne peut pas être à mes yeux une série de discours creux et sans suite concrète, mais au contraire des actes courageux qui feront entrer le socialisme français dans une nouvelle ère dont nous avons tous besoin.
J'ai donc engagé un processus d'enquête approfondie, qui a duré plusieurs mois, pendant lequel j'ai vu et revu des élus, des militants et des témoins qui ont tous confirmé la situation que j'ai décrite dans le rapport. Je puis donc confirmer que chacune des affirmations contenues dans ce rapport a été méthodiquement et précisément vérifiée et que des éléments de preuves précis et concordants de ce que j'ai décrit dans mon rapport de décembre sont disponibles.
Ces éléments probants concernent la violation caractérisée des statuts du Parti par le Président du Conseil Général de ce Département, la colonisation par des employés du Conseil Général des postes sensibles de la Fédération, le boycott des élections régionales par la Fédération, la distribution de subventions comme outil de pression, les brimades arbitraires sur les élus et citoyens indociles, les menaces physiques sur des hauts fonctionnaires du Conseil Général, et l'intimidation permanente sur certains élus socialistes pour qu'ils se conforment aux intérêts politiques ou financiers de la famille Guérini.
Est-il possible que les socialistes que nous sommes puissions demander des comptes aux abus de pouvoir du sarkozysme, exiger qu'il soit mis fin à la corruption du régime et du pouvoir actuels, notamment dans le soutien, mêlé à l'affairisme, aux dictatures déchues des pays arabes, si nous tolérons en notre sein des comportements aussi condamnables que repoussants ? Le socialisme qui reconstruira la République, après ces années de décomposition, défend une haute idée de la démocratie et doit affirmer ses propres valeurs, y compris contre ceux qui s'en réclameraient tout en les dégradant par leurs actes.
montebourg_sigleComme parlementaire et comme juriste, comme homme d'honneur ou comme socialiste engagé depuis trente années, pouvais-je accepter de me taire devant ces faits évidents et inacceptables qu'on m'implorait d'attester en haut lieu pour enfin tenter les faire cesser ?
Abraham Lincoln, l'un des Présidents fondateurs de la grande démocratie américaine avait prononcé cette phrase qui a toujours guidé mon action : "C'est en gardant le silence alors qu'ils devraient protester, que les hommes deviennent des lâches." Je n'ai pas voulu être ce lâche en fermant les yeux sur les agissements de certains socialistes des Bouches-du-Rhône. Et je ne souhaite pas que le parti dont je suis l'un des leaders soit fait de ce triste bois-là.
Tes collaborateurs zélés ont depuis le mois de décembre commis l'erreur dans cette grave affaire de nous emmener sur le terrain de la loi du silence. Ta haute responsabilité comme Première secrétaire chargée de protéger la réputation du socialisme français est au contraire de conduire une stratégie de délivrance à l'encontre des tables secrètes de ce genre de loi. Tu en as la charge morale vis à vis de l'avenir de nos idées, et tu en as pris l'engagement vis à vis de moi lorsque tu m'as proposé la mission -ni apparente, ni fictive- de rénover nos pratiques et notre mouvement politique.
J'ai retrouvé la lettre que je t'avais destinée par courriel la veille de ma déclaration de candidature aux primaires et qui t'annonçait mon rapport sur les Bouches-du-Rhône. Je t'y écrivais le 19 novembre 2010 : " Ma chère Martine, je veux te remettre les clés de l'organisation des primaires dont je deviens dès demain l'un des acteurs, en te priant de considérer mon dernier rapport de mission à Washington ainsi que la Charte Ethique qui l'accompagne comme véritablement indispensables à notre réussite collective quel que soit notre candidat. J'aurais voulu te transmettre un autre rapport inachevé que je te communiquerai dans la quinzaine. Il s'agit de mes constatations comme Secrétaire à la Rénovation sur les pratiques politiques de nos camarades socialistes dans les Bouches-du-Rhône.
Au mois de septembre, j'avais indiqué à François Lamy que j'avais l'intention de te faire rapport sur ce qu'en toute objectivité aucun Secrétaire National à la Rénovation digne de ce nom ne peut taire dès qu'il en a connaissance. François Lamy m'avait demandé de ne pas déposer ce rapport sur ton bureau. Je le ferai néanmoins, car cela t'aidera à prendre les bonnes décisions vis à vis de la Fédération des Bouches-du-Rhône qui à mes yeux mérite malheureusement un sort semblable à celle de l'Hérault. " Ce rapport te fut porté confidentiellement le 8 décembre.
Je regrette qu'on ait cherché à m'empêcher de produire ce rapport avant même son achèvement, je regrette qu'il ait été prétendu avoir été égaré alors que ma lettre annonçait sans ambages son contenu et ses conclusions, et que lorsqu'il fut enfin et effectivement lu, on s'employa à le combattre. Est-il encore possible d'éviter de constater, non sans une certaine désillusion, que tu parais avoir choisi fâcheusement de détourner le regard ?
Pourtant, refuser de porter comme un fardeau le poids des pratiques des Bouches-du-Rhône nous évitera un handicap persistant pendant l'élection présidentielle qui approche.
Dans la grande offensive que prépare le Front National, dans laquelle vont se jouer le sort et la survie de la République, crois-tu opportun de nous envoyer nous battre sur des béquilles, en maintenant notre solidarité avec des pratiques qui nous déshonorent tous ? Il me paraît de l'intérêt supérieur et commun de tous les socialistes de remédier à cette situation comme nous l'avons fait dans l'Hérault. C'est notre intérêt politique, quel que soit le chemin qu'empruntera la justice, car notre responsabilité de socialistes est de faire cesser les pratiques sulfureuses de la direction de cette Fédération, sans attendre que d'autres le disent à notre place puisqu'il s'agit de pratiques internes au Parti Socialiste dont le juge n'est pas saisi.
Il y a aussi, selon moi, nécessité à faire cesser les violations évidentes de nos statuts selon lesquels on ne peut pas diriger à la fois la Fédération et un Conseil Général. À quoi servirait-il qu'on ait instauré dans le programme de la rénovation une autorité éthique destinée à faire respecter les statuts pour laisser un élu en accointance avec la direction les violer avec allégresse ? Ce serait envoyer un message d'autorisation généralisée de piétinement de nos règles communes.
logo_PS_13Je maintiens donc les conclusions de mon rapport tendant à la mise sous tutelle de la Fédération des Bouches-du-Rhône. Tu viens d'ordonner une commission d'enquête à la demande de Jean‑Noël Guérini. Elle vient bien tard, mais je lui destinerai mes informations si elle est composée de personnalités indépendantes, insensibles aux intérêts politiques en jeu dans ce dossier.
Dans l'attente, je crois indispensable de décider un moratoire de toute prise nouvelle de responsabilités de l'intéressé, notamment à l'issue des élections cantonales, ce que demandent déjà publiquement nos alliés sur place.
Dans une période d'extrême défiance à l'encontre de l'action politique, notre responsabilité n'est à mon sens, ni de différer, ni de minimiser, ni de dissimuler. Elle est au contraire d'affronter la vérité, de la dire et de trancher les nœuds gordiens qui nous entravent depuis des années. Mettre nos actes en conformité avec le désir de probité la plus élémentaire et les attentes du peuple français à l'égard d'un grand parti de gouvernement comme le nôtre supportera-t-il longtemps la soumission à quelques intérêts locaux déliquescents ou l'obéissance à une médiocre frilosité dans une période où il faudra redoubler de courage ?
L'enjeu pour nous tous, socialistes, est de faire surgir dans la population les forces nouvelles qui transformeront avec nous la France. Mais qui veut changer la France doit changer d'abord soi-même, en inventant les pratiques d'un nouveau Parti, débarrassé des oripeaux d'années de compromissions ou d'habitudes détestables. Je décide quant à moi de croire viscéralement -avec tous ceux qui aiment et défendent la beauté exemplaire de la République- dans un mot : honneur. Ton bien dévoué et fidèle Secrétaire National à la Rénovation.
                                                     Arnaud Montebourg  Paris, le 6 mars 2011 

L'interview de Philippe San Marco dans le JDD
(clic sur l'image pour agrandir)
guerini_sanmarco
L'article de Marsactu :
http://www.marsactu.fr/2011/03/07/rapport-montebourg-les-tartuffes-de-la-rue-de-solferino/
Le site Agoravox :
http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/qui-donc-a-divulgue-le-rapport-90055

7 mars 2011

Affaire Guérini : Qui est le juge Charles Duchaine ?

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Dessin de Oliv' paru dans Bakchich

Il est le grand secoueur de cocotier qui a provoqué le grabuge dans les entrelacs de l'affaire Alexandre Guérini. Il ne donne pas d'interview. Il ne s'exprime pas dans les journaux. Et sa tête n'est pas connue de tout le monde. Mais, vu les remous que crée chacune de ses décisions, on sent en lui la pugnacité de l'homme résolu à ne rien lâcher. Et il semble bien qu'il ait sa propre méthode pour avancer un pas après l'autre dans son enquête au long cours.
On finirait par l'admirer tant il paraît vouloir aller au bout de cette affaire et de bien d'autres pour rendre justice face à des conduites qui manquent d'exemplarité.
Il sait certainement que chaque étape franchie déclenchera inévitablement des réactions contradictoires. Avec, d'un côté, celles qui appprouvent qu'un juge ne faiblisse pas dans la recherche de la vérité. Et de l'autre, celles des protagonistes ou de leurs proches qui subissent ou craignent la contrainte de répondre de leurs délits présumés devant la loi. Avec l'affaire Guérini, tous les ingrédients sont là pour qu'un jour la littérature et/ou le cinéma s'en emparent. Alors, qui est donc ce juge Charles Duchaine ?
Voici le récit qu'a publié le magazine Les InRockuptibles la semaine dernière sous la signature du jeune et très brillant Xavier Monnier, ex-cofondateur de Bakchich.

logo_inrockuptibles
Le juge qui voulait nettoyer les ordures
2 mars 2011 par Xavier Monnier

Les entrepreneurs véreux et le détournement d'offres publiques, c'est sa spécialité. Depuis deux ans, Charles Duchaine fouille le marché des poubelles de Marseille, verrouillé par Alexandre Guérini, le frère du sénateur PS. Une affaire à la hauteur de son ambition.
A Marseille, même les résultats de l'OM passent au second plan. Les élus locaux s'angoissent et l'histoire remue la ville depuis deux ans : avant de quitter son poste après un septennat d'exercice, le juge d'instruction Charles Duchaine voudrait boucler la plus grande affaire des vingt dernières années, celle que le magistrat et ses gendarmes ont nommée "Guernica".
Le dossier concerne les marchés présumés truqués du département, et particulièrement du traitement des déchets, avec détournement d'offres publiques : il paraît aussi complexe que le chef-d'œuvre de Picasso. De grands noms, de Marseille à Paris, jusqu'à l'Elysée, affleurent au fil de la procédure. L'histoire s'enclenche après une lettre anonyme datée du 2 février 2009, qui dénonce des malversations présumées des frères Guérini, Alexandre et Jean-Noël, responsables du Parti socialiste marseillais des années 2000 et natifs de Calenzana, en Haute-Corse.
Jean-Noël est sénateur, président du conseil général, secrétaire de la fédération socialiste, le plus visible des deux. Alexandre, dit Alex, grande gueule et businessman, s'occupe, lui, du marché des ordures, pèse sur l'attribution des marchés publics, la bonne tenue du parti. On le soupçonne de relations avec des milieux louches. La lettre anonyme, neuf pages, dénonce un système qui oppresse la ville à cause de la passivité du monde politique, droite et gauche confondues. Il y a danger à se saisir de l'affaire vu ses dimensions politiques locales et nationales.
Le directeur de cabinet de Sarkozy, Christian Frémont, a officié comme préfet de la ville ; Bernard Squarcini, à la tête de la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI), comme préfet de police. Suez et Veolia possèdent de nombreux marchés dans la ville, que certains s'amusent à nommer 'Veolialand". Qu'importe. Duchaine, passionné de sports mécaniques, adore les frissons. Haute stature, le magistrat arrive toujours au palais à moto.
Il ouvre le dossier le 16 avril 2009. Le 27 avril, il trouve sur son bureau la retranscription d'une conversation entre Jean-Noël et Alexandre Guérini.
Jean-Noël : "… Il me dit bon, il me dit, l'enquête préliminaire sera ouverte. A mon avis, ça doit être pour les décharges, Alex.
Alexandre : Hé, qu'est-ce que tu veux que ce soit ?
Jean-Noël : Hum, mais de toute façon au bout de trois ans y a prescription, ils peuvent rien faire […]
Alexandre : Ouais, dis-moi… Euh… Demande le service que c'est quand même.
Jean-Noël : Oui, oui, demain, hein.
Alexandre : Avec précision, bien sûr, demain."
Traduction : Jean-Noël Guérini apprend à son frère Alexandre que la justice vient d'ouvrir une enquête contre eux à la suite d'un courrier anonyme.
Leur informateur se trouve alors à Madrid où Nicolas Sarkozy effectue une visite. A ses côtés, Renaud Muselier, député UMP de Marseille, alias "la dinde" ou "le docteur" dans les écoutes, que les frères soupçonnent d'avoir envoyé la lettre anonyme. Frédéric Péchenard, directeur général de la police nationale, Bernard Squarcini et un général de gendarmerie accompagnent aussi le président de la République.
A 48 ans, "Duduche", comme on le surnomme, est devenu un spécialiste des dossiers financiers complexes qui mélangent politiques, mafieux, entrepreneurs véreux et marchés publics. Un champ vaste, dense et bouillant que laboure le juge paysan. Et à Marseille, la terre est fertile. Entre influence corse, chaleur méditerranéenne et clientélisme atavique, les dossiers s'empilent. Le juge est devenu une curiosité de la ville.
En janvier 2008, déjà, il avait fait emprisonner Jean-Christophe Angélini, un élu corse, à la sortie d'un restaurant parisien où il déjeunait avec le "Squale", surnom de Bernard Squarcini. Quelques jours après, Eric-Marie de Ficquelmont, ami d'enfance de Frédéric Péchenard était arrêté puis relâché sans charge. Tout ce beau monde figurait dans le dossier de la SMS, une entreprise de sécurité montée par un ancien nationaliste, Antoine Nivaggioni, soupçonné d'avoir truqué des marchés publics. "Le juge n'est pas diplomate, sourit aujourd'hui un de ses collègues de l'instruction. Quand il tape, il tape." Ça agace en haut lieu.
A l'époque, Duchaine avait convoqué le personnel des RG pour audition : les renseignements généraux étaient soupçonnés d'avoir alerté Nivaggioni de l'avancée de l'enquête, et celui-ci avait disparu pendant dix-huit mois. Dans le bureau du juge, on trouvait alors des flics corses, réputés proches de Squarcini, et le futur préfet de police de l'île de Beauté, Jean-François Lelièvre. Ce genre de remue-ménage n'émeut guère le juge.
L'affaire Guérini n'arrange rien à sa réputation et à ses rapports avec Bernard Squarcini. Le 8 octobre 2009, sept mois après l'ouverture de l'enquête, Alexandre Guérini reçoit un texto de son avocat Olivier Grimaldi. "Le Squale' a dit que tout était écrasé et que des coups de fils avaient été passés."
Proche de Jean-Noël Guérini, avec qui il a effectué sa rééducation cardiaque, le directeur du renseignement Squarcini n'a vu que deux fois Alexandre, selon ce dernier. Mais en audition, l'avocat fait une drôle de déclaration : ''Alexandre Guérini était très inquiet au regard des articles de presse qui sortaient, je pense qu'il a essayé de s'informer auprès des services de M. Squarcini." Etrange, car le 8 octobre 2009, la presse n'a encore publié aucun article sur une instruction qui ne sera dévoilée que le 17 novembre suivant. Et le nom de Squarcini n'apparaît pas dans les écoutes. Pas de preuve, seulement un soupçon.

Duchaine aime les gros coups de filet, les enquêtes médiatiques
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Après les multiples révélations dans la presse sur ses discussions avec son frère Alexandre, Jean-Noël a porté plainte pour violation du secret de l'instruction.
"Nous avions déposé plainte le 6 février, précise son avocat Me Dominique Mattei, nous l'avons à nouveau fait en nous étonnant que notre première action n'ait eu aucun effet. Au moins la, une enquête préliminaire a été ouverte le 19 février, et confiée à la police judiciaire."
Or, Duchaine se trouve en mauvais termes avec les policiers. Un haut flic marseillais qui a bloqué l'une des enquêtes du juge est dans le collimateur de l'Inspection générale de la police (IGPN). Ce commissaire a des rapports un peu trop proches avec les malfrats de la région. De la porosité, comme on dit à Marseille. Il peste ostensiblement contre le magistrat dans les couloirs de l'Evêché, le commissariat central de Marseille.
"Il est presque impossible de dessaisir Duchaine", tempère un avocat impliqué dans le dossier. De toute façon, le parquet le soutient totalement. Le procureur de Marseille Jacques Dallest dit souvent "qu'il peut être caractériel, mais que s'il n'y avait que des juges comme lui, les affaires aboutiraient plus souvent".
Duchaine est un colérique et ne le cache pas. Bien des avocats ou des prévenus ont été témoins de ses sautes d'humeur ou ses coups de gueule contre les journalistes qui bénéficient des fuites… "C'est à cause de gens comme ça qu'on se retrouve avec des morts dans les dossiers", déclara-t-il un jour devant des avocats médusés.

Peut-on écarter Duchaine par une promotion ?
Le magistrat se montre assez honnête pour avouer que sa carrière ne le laisse pas insensible. Un avocat bien en cour à l'Elysée lui a proposé un poste dans le privé. Duchaine a refusé : "Franchement, s'ils veulent m'acheter, ils pourraient y mettre les moyens", a-t-il blagué devant un collègue parisien.
Duchaine espérait obtenir la direction de l'Agence de recouvrement des avoirs saisis et confisqués, qui sert à gérer les biens issus du grand banditisme. On la lui a refusée malgré une promesse et sa participation à la rédaction du texte de loi qui institue l'agence. "C'est un juriste fin, un professionnel foncièrement honnête, explique un avocat de la galaxie Guérini. Mais c'est un être complexe, dépité devant le manque de moyens de la justice et parfois ses lenteurs, ses dysfonctionnements."
On peut s'en rendre compte en lisant son livre titré Juge à Monaco (Michel Lafon). Charles Duchaine y raconte son expérience de magistrat détaché dans la principauté entre 1994 et 1999. Il parle de sa famille (marié, deux enfants), rend hommage à sa greffière, et se révolte contre la justice de classe, mais dévoile son goût pour les grands coups de filets, les enquêtes médiatiques qui parfois le rendent "excité comme un gamin". Mégalo ? "Non, aveuglé par le goût du résultat", dit ce même avocat.
A Monaco, il se fera fort de boucler la première enquête pour blanchiment avéré dans le micro-Etat. Ce sera sa seule satisfaction. Daniel Ducruet, l'ancien époux de la princesse Stéphanie de Monaco, le fera condamner pour diffamation à la parution du livre.
Cette volonté de sortir des affaires lui a valu une violente campagne de sa hiérarchie. Ironie de l'histoire, son ancien supérieur, Jean-Pierre Picca, est aujourd'hui le conseiller justice de Nicolas Sarkozy - et a donc un pouvoir sur la promotion des juges. Sur l'avenir de Duchaine, les paris sont ouverts. Quelle affaire va-t-il encore débusquer ? Quel homme politique va-t-il convoquer ? Et surtout, où va-t-il partir ?

5 mars 2011

La plainte de Guérini contre le rapport Montebourg

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Jean-Noël Guérini n'est pas content. Il l'a vite fait savoir, bras en colère, sourcils circonflexes et mots de représailles, à la poignée de militants qui lui ont tous claqué la bise jeudi soir lors d'une réunion électorale à Gignac-la-Nerthe.
Pour lui, Arnaud Montebourg se prend pour un "procureur, son attitude digne d'un inquisiteur est inacceptable". Le texte de son rapport est "mensonger, calomnieux et diffamatoire". Ouille, ça pique ! Et il porte plainte contre Montebourg. Même méthode que pour les plaintes déjà engagées contre les médias qui ont dévoilé les conversations entre les deux frères Guérini. Il faut bien se défendre.
Dans les journées de jeudi et vendredi, les réactions n'ont pas tardé. Jean-David Ciot, premier secrétaire fédéral délégué, a tenu une conférence de presse pour tirer de côté et même en face. C'est la droite qui manipulerait en collusion avec Montebourg. Pas moins.
Patrick Mennucci, lui, pense aux cantonales et, sauve-qui-peut, défend tous les candidats qui sont honnêtes et qui travaillent. Mais, étrangement, on ne l'a pas entendu prononcer le nom de Jean-Noël Guérini ou alors cela nous échappé.
Eugène Caselli s'est contenté d'emboîter le pas à François Lamy, proche de Martine Aubry, qui a indiqué qu'"il n'y a pas d'éléments précis dans ce rapport". Puisqu'il le dit.
Dans le genre qui se ferait tuer pour sauver le parti, Razzy Hammadi, proche de Benoît Hamon, a déclaré qu'"il ne lâcherait pas un camarade innocent, sali mais en aucun cas coupable". Puis, ce fut au tour de Harlem Désir de faire savoir, en déviant du sujet, que "Jean-Noël Guérini n'est en rien mis en cause" dans l'affaire de son frère. Quant à Pierre Moscovici, il a fait dans le laconique : "ces accusations ne reposent sur rien." Fermez le ban. Ségolène Royal, elle qui avait été soutenue par Guérini, exige un parti "exemplaire" et "irréprochable".
Mais deux ou trois voix en ont dit un peu plus. Stéphane Le Foll, proche de François Hollande, estime que le rapport Montebourg "pointe un certain nombre de problèmes". Allez, encore un effort ! Jean-Marc Ayrault demande qu'"un collège de personnalitrés indépendantes se rende sur place et rende compte aux instances dirigeantes". Pour un apéro ? Malek Boutih va plus loin : "On est à quinze jours des cantonales, ce n'est peut-être pas le moment de trancher à vif", "mais je ne pense pas qu'on puisse dire 'circulez, y a rien à voir'". Oh l'imprudent !
Enfin, on attendait la réaction de Martine Aubry en personne, alors qu'on la sentait dans le déni. "Il n'y a pas de faits dans le rapport Montebourg". Elle a donc dû le lire. Mais, pressée de toutes parts, elle a finalement concédé que "bien sûr, il y aura une commission d'enquête puisqu'elle est demandée". On devine par qui.
Par communiqué, Jean-Noël Guérini s'exprime ainsi : "Conformément à nos statuts (ah, il se conforme aux statuts maintenant ?), j'ai demandé officiellement à Martine Aubry d'engager un audit spécifique de la fédération socialiste afin de faire taire, une bonne fois pour toute, les médisances et la calomnie". "
Ce contrôle permettra de mettre un terme aux rumeurs mensongères et malveillantes relayées par la presse à la suite de la publication d'un pseudo-rapport rédigé par Arnaud Montebourg".
Notons la richesse du vocabulaire : "collège de personnalités indépendantes", "commission d'enquête", "audit", "contrôle", alors que, selon Guérini, le rapport Montebourg tiendrait du "réquisitoire" et relèverait de "l'Inquisition".
Côté droite marseillaise, Renaud Muselier se répand en champion "c'est-moi-le-premier-qui-a-dit". "C'est la première fois qu'un rapport explique ce qui se passe dans le PS des Bouches-du-Rhône, ce que tout le monde sait mais que personne n'ose dire ou écrire. Nous, nous le disons depuis longtemps et Jean-Claude Gaudin a rappelé lors de la dernière campagne des sénatoriales que «le mode d'emploi de Jean-Noël Guérini est le chéquier ou le revolver» !"
C'est vrai que l'UMP lave particulièrement blanc. Il n'y a jamais eu de bagarres internes, de soupçons de fraude, de conflits d'intérêts et, miel du miel, des condamnations de ministres.

"Il n'y a pas de faits", ah bon ?

gif_eruptionQuant aux pratiques côté socialiste, il est pour le moins risqué d'affirmer que tout serait clair.
Harlem Désir, interrogé sur les accusations de clientélisme, a répondu n'avoir "pas d'informations de cette nature". Sur l'existence de fausses cartes et trucage de scrutin évoqués par Montebourg, il a souligné que "depuis que Martine Aubry est arrivée à la tête du PS les fichiers d'adhérents ont été nettoyés" et que "50.000 noms de personnes qui ne renouvelaient pas leur cotisation ont été rayés des listes". "Même dans les Bouches-du-Rhône, on a vu diminuer à partir de là le nombre de gens qui étaient enregistrés, c'est une fédération qui fonctionne." On est heureux d'apprendre que ces gens votaient juste avant ! Il a ajouté toutefois que s'il s'avère qu'il y a "des problèmes dans cette fédération, nous prendrons nos responsabiliés".
C'est bien de cela qu'il s'agit entre autres dans le rapport Montebourg. Et pas de la réponse en pirouette de François Lamy : "
Les comptes de la fédération ont été expertisés, comme pour toutes nos fédérations, il n'y a aucun problème."
Jean-David Ciot élargit la défense contre l'idée d'opacité en estimant que "tous les éléments ayant trait à la vie départementale du PS sont publics, vérifiables et contrôlables". Alors, allons-y pour des contrôles !
Pour rappel, on s'étonne encore par exemple de la dissolution de sections "mal votantes" à Marseille et de la fusion de sections à Aix. On ne peut que s'interroger aussi, à lire les retranscriptions d'écoutes sur l'affaire Guérini, sur les pressions, les menaces, les recrutements, les mises au placard ou le favortisime avec passerelles entre les collectivités et le parti socialiste.
Quant aux conditions de déroulement de vote, qui ont encore cours lors d'élections internes, sans même un petit semblant d'isoloir, sans urne transparente, sans émargement ou sans surveillance, et avec fausses cartes persistantes, sont-elles vraiment révolues ? Tout récemment encore des militants m'en ont fait la confidence.
Et puis, n'est-ce pas un fait anormal de voir Jean-Noël Guérini s'être fait désigner "président" de la fédération départementale en incompatibilité totale, selon les statuts, avec sa fonction de président du conseil général et aussi d'apprendre que la direction nationale du PS a validé le coup ?
"Il n'y a pas de faits." Ah bon ?

Merci aux visiteurs qui ont commenté l'article de jeudi et à ceux qui ont diffusé des liens vers le blog.

Un éclairant petit retour en arrière :
"Votes PS : Les urnes ont-elles tout dit ?" :
http://castronovo.canalblog.com/archives/2008/11/24/11489928.html
Lire aussi sur le site Marsactu :
http://www.marsactu.fr/2011/03/04/petits-votes-entre-amis-a-la-federation-ps-des-bouches-du-rhone/
Et sur le site Libé Marseille :
http://www.libemarseille.fr/henry/2011/03/le-ps-se-d%C3%A9chire-sur-les-affaires-gu%C3%A9rini.html

3 mars 2011

Le rapport Montebourg qui assassine la "Fédé PS 13"

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(Clic sur l'image pour agrandir)

Joli éclat médiatique réalisé par Le Point. L'hebdomadaire a mis en ligne le rapport assassin d'Arnaud Montebourg sur les pratiques de la Fédération socialiste des Bouches-du-Rhône. Ce rapport rédigé en décembre avait été adressé à Martine Aubry qui avait assuré qu'elle ne l'avait pas reçu.
D'où un nouvel envoi doublé cette fois-ci d'une diffusion qui aurait dû demeurer confidentielle. Et qui évoque par là même et sans ambages les dysfonctionnements du Conseil général et le rôle omnipotent de Jean-Noël Guérini.
Beaucoup d'éléments cités dans le rapport sont connus, notamment dans notre région. Cependant, ce qui donne à ce document une force terrible, c'est, d'une part, l'alerte transmise en interne au parti socialiste, et d'autre part, la publication d'informations qui, par essence, n'auraient jamais dû fuiter par voie de presse. Mais voilà, maintenant au moins le silence est rompu et tout est devenu public.
On peut penser ce que l'on veut du personnage Arnaud Montebourg mais, jusqu'à plus ample informé, il est quand même bien le seul à avoir osé. Le texte de ce brûlot comporte de rudes constats mais aussi des préconisations pour remédier à "ces graves anomalies" comme il les nomme.
Dans mon billet de mercredi, je parlais de "silences qui en disent long". On a maintenant une compilation de faits qui étaient jusqu'à présent chuchotés quand ils n'étaient pas carrément occultés ou démentis. Voici donc le rapport intégral qui va créer une belle zizanie tant au niveau local qu'au niveau national.
Cela risque fort de provoquer des dégâts, sur le cours terme avec les cantonales dans quinze jours, sur le moyen terme avec les primaires et à plus long terme avec la présidentielle et les législatives. Mais tant pis. Surtout pour ceux qui n'ont aucun scrupule pour contrevenir à des conduites exemplaires.
A Aix, par exemple, qui ne se rappelle le coup de force qui a vu les trois sections socialistes être fusionnées en une seule contre l'avis d'une majorité de leurs militants ? Va-t-on aussi enfin savoir qui a été embauché ici par piston pour services rendus ou à rendre et qui a profité là de complaisances de toutes sortes pour une aide magouillée ? Chaque chose en son temps…

RAPPORT DE CONSTATATION SUR LES PRATIQUES
DE LA FEDERATION SOCIALISTE DES BOUCHES-DU-RHONE

La Fédération des Bouches-du-Rhône est historiquement connue pour faire l'objet de pratiques contestables qui ont déjà donné lieu dans le passé à de sérieuses remises en ordre : fausses cartes, trucage des scrutins, pressions sur les militants, utilisation des collectivités locales comme outil de compression du débat démocratique.
A la suite d'un voyage dans les Bouches-du-Rhône au mois de juin 2010, et particulièrement à Marseille, il m'a paru nécessaire de relater et de transcrire certaines pratiques incompatibles avec l'idéal socialiste et en infraction directe et frontale avec les statuts de notre parti.
Ce document confidentiel est destiné au Premier secrétariat du Parti Socialiste. Il a pour but d'alerter sur ces graves anomalies qui pourraient conduire à compromettre la direction du parti, si celle-ci ne donnait pas de suite à ce présent document, avec les pratiques les plus contestables de cette Fédération.
Un secrétaire national chargé de la Rénovation, placé dans la situation de devoir constater de telles pratiques est dans l'impossibilité morale et politique, non seulement de se taire mais de les taire à la direction politique de son parti, dès lors que le programme de rénovation initié avec l'aide de la direction issue de Congrès de Reims observe des objectifs sincères et authentiques.

1. Une démocratie pluraliste inexistante

Tout le système fédéral est construit autour de la domination du Conseil général sur le parti. Le Conseil général, machine à distribuer des postes d'élus ou d'employés, est utilisé comme instrument clientéliste, non pas aux fins de développer le parti, combattre la droite, faire rayonner nos valeurs et notre idéal, mais tout au contraire à asseoir sans partage le pouvoir de son président sur le parti, sur les autres collectivités locales, que ce soit l'agglomération marseillaise ou, jusques et y compris, la Région Provence-Alpes-Côte d'Azur.
L'argent public y est notoirement utilisé pour faire pression sur les élus socialistes afin de s'assurer de leur soutien sans faille -pour ne pas dire leur docilité- quand il ne s'agit pas de leur silence, là où, au contraire, le parti qui est chargé de délivrer les investitures, devrait pouvoir organiser le débat et le contrôle des élus socialistes afin de discuter avec les militants, des orientations politiques de leurs grands élus. Le cabinet du président du Conseil général est ainsi devenu le lieu de contrôle de la vie militante dont l'essentiel de l'activité consiste à s'assurer la fidélité aveugle des responsables de sections ou des cadres fédéraux de notre parti.
Le Premier secrétaire fédéral, Eugène Caselli, a pendant plusieurs années été mis en quelque sorte sous le contrôle d'un des membres du cabinet du président du Conseil Général, lequel est devenu premier secrétaire délégué après le Congrès de Reims, dont il a dû être inséparablement flanqué.
On peut indiquer pour justice que si, pendant toutes ces années, la Fédération a cherché à exercer son légitime contrepoids à l'égard du Conseil général et de son président, néanmoins, le cabinet du Conseil général a toujours considéré la Fédération comme son apanage et son bien.

2. La violation des statuts et l'autoproclamation d'un «président» de Fédération

A l'issue du Congrès de Reims, le Premier secrétaire fédéral des Bouches-du-Rhône, Eugène Caselli, devenu, en 2008, président de la Communauté Urbaine Marseillaise, avait été reconduit, par le vote au suffrage universel, Premier secrétaire fédéral.
Considérant que ce contrôle politique du président du Conseil général était insuffisant sur la Fédération, notre camarade Jean-Noël Guérini s'est auto-proclamé président de la Fédération socialiste des Bouches du Rhône, un poste qui n'existe pas dans les statuts, au cours d'un Conseil fédéral réuni le 5 février 2010 à Marseille. Plusieurs secrétaires fédéraux ont témoigné que la salle était en majorité composée de personnes qui ne sont pas membres du Conseil fédéral et pour la plupart employées du Conseil général. Cette réunion, qui s'était tenue en l'absence de la plupart des élus importants du département, a conduit à «l'élection» d'un président de la Fédération après que notre camarade Eugène Caselli a décidé de démissionner subitement.
Cette prise de pouvoir sur le parti par le président du Conseil général constitue une violation caractérisée des statuts car la présidence d'une Fédération n'existe pas dans nos statuts. Le seul poste réglementaire est celui de président du Conseil fédéral qui est un poste assurant exclusivement les délibérations de l'organe délibérant du parti, le Conseil fédéral, et ne confère, de quelque manière que ce soit, aucune prérogative exécutive que les statuts réservent au Premier secrétaire fédéral ou par délégation aux secrétaires fédéraux. Pourtant, Jean-Noël Guérini se comporte en Premier secrétaire fédéral puisqu'il signe désormais les circulaires, disposant de pouvoirs qu'il ne peut pas exercer dans la légalité du parti.
Par ailleurs, un Premier secrétaire fédéral ne peut qu'être élu au suffrage universel des militants, ce que l'intéressé n'a jamais sollicité. Enfin, l'article 16-2 des statuts du Parti Socialiste dispose : «A l'échelon départemental, les fonctions de président du Conseil général sont incompatibles avec celles de Premier secrétaire fédéral». Ainsi, Jean Noël Guérini ne peut pas exercer les fonctions qu'il prétend aujourd'hui exercer. Il est en conséquence en situation d'usurpation de poste et de violation caractérisée de nos statuts qui devraient justifier sa destitution automatique par les instances nationales.

3. Un système de pression féodal reposant sur l'intimidation et la peur

logo_CG13Le contrôle sans limite de Jean-Noël Guérini sur le parti s’exerce par la mise en place systématique à la direction des sections marseillaises d'employés du Conseil général, substituant aux règles de pluralisme appartenant à la tradition du parti, celle d'un clientélisme féodal où la soumission et le culte du chef ont désormais cours : 13 des 18 secteurs marseillais sont directement contrôlés de cette façon.
Le poids acquis du Conseil Général sur le parti pèse extrêmement lourd sur les élus tant l’obtention des subventions pour des associations locales est malheureusement liée au degré de fidélité que les élus ont à l’égard du président. Ainsi, j'ai pu recueillir des témoignages relatant l'utilisation des moyens publics retirés ou attribués au gré des humeurs arbitraires du président, non pas en fonction de la pertinence des projets portés par les élus ou leurs partenaires associatifs, mais en fonction du degré d'allégeance ou de résistance au pouvoir exercé par ledit président du Conseil général : ainsi, régulièrement des conseillers généraux sont en disgrâce, puis en fonction de l’intérêt du moment, reviennent au premier plan, leurs moyens et les subventions qu'ils demandent sont restreintes, jusqu'à ce qu'ils fassent à nouveau allégeance.
Ce système de domination sans limite peut conduire aux dérives les plus graves dans l'usage de l'argent public, car il fait disparaître toute forme de contrôle politique ou administratif interne aux collectivités sur l'argent public, et peut conduire à la confusion entre l'exercice du pouvoir et l'appropriation personnelle de ce dernier. Ce système a d'ores et déjà conduit à des dérives particulièrement préoccupantes, qui ont amené le secrétariat national à la Rénovation à saisir d'initiative le Premier secrétariat en raison du risque pesant sur l'image nationale des socialistes à ne pas réagir : un élu résistant aux méthodes du président m'a fait part de faits de menaces physiques et d'intimidations de la part d'un homme armé se présentant comme défenseur des intérêts du président du Conseil général. Un haut fonctionnaire du Conseil général des Bouches-du-Rhône a expliqué à l'un de ses collègues et confident qu'il avait lui même été menacé ainsi que son épouse et ses enfants, parce qu'il avait refusé de suivre certaines procédures peu orthodoxes. A chaque fois ce sont des hommes apeurés qui s'expriment, ce point m'ayant sensiblement frappé.
C'est pourquoi j'ai pris en conscience de socialiste la décision de saisir la plus haute instance du parti afin qu'elle mette un terme à de si graves agissements incompatibles avec l'idéal et les valeurs socialistes. Depuis l'ouverture d'une information judiciaire sur les marchés publics passés dans les Bouches-du-Rhône, les pressions et les menaces sur les camarades se sont généralisées.
Le 17 mars 2010, au cours d'une réunion de groupe des élus PS, Jean-Noël Guérini affirma, en défiant la loi, disposer d'écoutes et de SMS démontrant que certains camarades l’auraient dénoncé dans les affaires politico-judiciaires en cours.
Ce 17 mars 2010 à l'invitation de la sénatrice Samia Ghali, à la mairie des 15e et 16e arrondissements de Marseille, s'est tenue cette réunion du groupe des élus socialistes du conseil municipal, que préside Patrick Mennucci. Ce dernier a appelé les élus un par un avec une mention de «présence obligatoire car Jean-Noël Guérini est là», alors qu'il venait de démissionner du conseil municipal pour cause de cumul des mandats, exerçant à l'occasion une ingérence manifeste dans les débats municipaux, lesquels auraient dû se dérouler indépendamment des intérêts du Conseil général et de son président.
Les débats s'éternisèrent, la séance durant plusieurs heures. Au moment où Eugène Caselli, président de la Communauté Urbaine de Marseille, rendait compte de la grève qui a paralysé une société chargée de la collecte des ordures, ISS, Jean-Noël Guérini, président du Conseil général, face à des élus stupéfaits, évoqua les lettres anonymes qui ont entraîné les investigations de la justice : "Je connais les responsables", lança-t-il. Puis, il s'en prit à ceux de nos camarades qu'il considérerait trop bavards avec la presse : "Je sais avec qui vous parlez, je sais quels journalistes vous voyez, j'ai même le texte de vos SMS...". Il évoqua également des relevés d'écoutes téléphoniques qu'il aurait en sa possession et accusa deux de nos camarades directement, François Noël Bernardi, le président de la commission des marchés de la Communauté Urbaine de Marseille et Patrick Mennucci, président du groupe «Faire Gagner Marseille» d'être actionnaires de Bakchich, le site d'information satirique qui a révélé l'existence de l'enquête sur les marchés publics.

4. Une Fédération hostile aux intérêts de la gauche durant les Elections Régionales

logo_PS_13_federationComme l’avait souligné le Président de Région, Michel Vauzelle, lors d’un Bureau national à l'issue des élections régionales de mars 2010, la campagne qu'il menait a été victime d’un boycott ouvert et public de la Fédération des Bouches-du-Rhône et du Conseil général, qui aurait pu être beaucoup plus dévastateur si Michel Vauzelle n’était pas aussi bien implanté dans la région PACA.
Le Premier secrétaire fédéral et ses représentants ne participaient que très rarement aux réunions de direction de campagne réunissant de manière hebdomadaire les Fédérations composant la région.
La Fédération des Bouches-du-Rhône n’a participé à aucune des actions de campagne, la direction de campagne s’appuyant uniquement sur les candidats des Bouches-du-Rhône et les quelques sections volontaires. Le Premier secrétaire fédéral ainsi que le président de la Fédération ont été très absents des différentes visites organisées pour le candidat.
Enfin la direction de campagne a eu les pires difficultés à régler les problèmes financiers liés à la campagne, la Fédération des Bouches-du-Rhône refusant de reverser la contribution des élus des Bouches-du-Rhône pour la campagne.
La même Fédération a boycotté le meeting de Michel Vauzelle, le 11 mars au Dock des suds. Jean-Noël Guérini et Eugène Caselli étaient absents et expliquèrent à la presse que : "Nous ne sommes pas allés à ce meeting parce qu'on n'était pas très content de ce qui s'était passé sur les listes". La volonté de nuisance était telle que des cars de militants ont même été décommandés au dernier moment sur ordre de la Fédération.

5. Une opposition molle à la droite locale et nationale au détriment du Parti

Chacun connaît l'entente notoire et quasi parfaite entre Jean-Claude Gaudin, le chef local de l'UMP, et Jean-Noël Guérini. Aucune position de nos camarades maires de Secteur (combat sur la création de garderies du soir dans les écoles, dans les investissements en matière de politique de la ville, sur l’importance de réhabiliter les équipements sportifs de proximité avant d’investir dans une patinoire, …) n’a été soutenue par Jean-Noël Guérini pour afficher nos différences de points de vue concernant la gestion d’une municipalité, comme s'il existait un partage des territoires entre le Conseil général et le Maire de Marseille.
Afin de protéger des équilibres à la communauté urbaine, la Fédération et le Conseil général tentèrent d’empêcher la création de sections nouvelles du Parti Socialiste comme à Saint-Victoret où nous avons une trentaine de militants qui ont été obligés de passer par le national pour pouvoir se constituer en section.

6. Une mise sous tutelle indispensable de la Fédération des Bouches-du-Rhône

Si la direction du parti n'a pas de compétence pour juger du bon respect de la loi républicaine par les dirigeants de la Fédération dans leur comportement à la tête de leur collectivité, ce qui revient exclusivement à la justice -heureusement saisie en l'espèce-, il n'en reste pas moins que celle-ci a une responsabilité particulière et directe en ne faisant pas cesser la douce tolérance à l'égard de pratiques qui nous déshonorent collectivement et rendent impossible l'adhésion à nos valeurs, nos projets et notre idéal. Je suggère au Premier secrétariat de saisir le Bureau National d'une mise sous tutelle de la Fédération emportant destitution de droit des dirigeants actuels de la Fédération des Bouches-du-Rhône. Le plus vite sera le mieux au vu des menaces judiciaires qui pèsent sur les intéressés. J'apporterai mon entier soutien aux initiatives de la Direction nationale pour mettre fin à ces dérives.
                                                                  Fait à Paris, le 8 décembre 2010.

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2 mars 2011

Affaire Guérini : Quelques silences qui en disent long

guerini_moi_cest_moi_ravi_82En l'état de l'enquête, a-t-on vraiment tout dit sur l'affaire Guérini ? Pas sûr. Et il est même assez probable que la poursuite et l'approfondissement des investigations par le juge Charles Duchaine ne manqueront pas de dévoiler de nouveaux éléments.
C'est ce qui pousse nombre de personnes à la méfiance et à garder bouche cousue.
Par exemple, rares sont les élus qui livrent un avis sur le remue-ménage qui secoue la vie locale depuis plusieurs mois.
Rares aussi sont les adhérents ou militants des partis politiques, en particulier ceux du parti socialiste, qui osent briser le silence. Et pourtant, ils sont loin de ne pas savoir ou de n'en rien penser. J'en ai pour preuve quelques confidences personnelles que me font certains par confiance mais que je ne peux malheureusement pas citer ici.
Dans son édition de février, le Ravi a interrogé quelques élus ou membres locaux de partis politiques. On pourra en prendre connaissance dans l'article ci-après.
Par ailleurs, l'affaire a donné lieu à pas mal d'articles ou de dossiers dans divers journaux, magazines et sites internet. Le dernier en date est le billet de Daniel Schneidermann sur Arrêt sur images. Où l'éditorialiste fait mine de s'interroger sur ce qui peut bien motiver le fait que l'on parle peu d'un personnage haut, très haut placé. (Voir en fin d'article)
Enfin, c'est à découvrir dans sa parution d'aujourd'hui, l'hebdo Les InRockuptibles balance un article intitulé "Le juge qui fait peur à Marseille".

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Un conflit juridico-politique intéressé

L'enquête visant le frère de Jean-Noël Guérini, président du Conseil général du "13" s'invite avec fracas dans la campagne des cantonales.
"J'invite les électeurs de gauche à voter NPA ou Front de gauche, bref pour tous les candidats non issus du système Guérini !" Bruno Gilles, secrétaire adjoint de l'UMP des Bouches-du-Rhône, à la manœuvre aux cantonales, sonne la charge. "Aller voter PS, c'est cautionner les affaires ju­diciaires en cours !", poursuit le sénateur-maire. La présomption d'innocence ? "J'y suis attaché mais il ne faut pas être des oies blanches. Il n'y a pas un seul domaine de compétence de Marseille Provence Métropole ou du Conseil général qui échappe aux soupçons." L'UMP 13 s'est choisi un slogan de campagne : "le choix de l'honnêteté". "Nous avons eu plus de facilité à le faire accepter par nos troupes que celles du PS à assumer un bandeau "avec Jean-Noël Guérini", martèle Bruno Gilles.
Alexandre Guérini est mis en en examen pour "abus de biens sociaux, détournement de fonds et de biens publics, recel, corruption active, trafic d'influence" sans être condamné. Jean-Noël, son frère, n'a pas été entendu par la justice. Le Conseil général qu'il préside est pour l'instant officiellement épargné. Mais les auditions de justice, qui s'étalent dans la presse, témoignent de l'interventionnisme d'A!exandre dans les institutions gérées par le PS. Et une question agite le landerneau politique et médiatique : y-a-t-il eu conflit d'intérêt entre les activités présumées frauduleuses d'Alexandre et son frère, Jean-Noël ? Bruno Gilles, toujours, sans pincettes : "Décharges, déchets, SDIS (sapeurs-pompiers), maisons de re­traite, 13 Habitat (logement social), cela fait beaucoup d'endroits où Alexandre Guérini est présent. Je ne peux pas croire une seconde, si les accusations graves s'avèrent vraies, que ces faits aient pu avoir lieu sans que son propre frère soit au courant."
Cela cogne dur à gauche aussi ! "Chaque jour qui passe nous apporte de nouvelles révélations sur le système de dé­tournement de fonds publics mis en place et les liens entre­tenus avec le milieu", dénonce un communiqué du NPA intitulé "rompre avec le système Guérini". "Nous ne disons pas que Jean-Noël est coupable de quoi que ce soit, mais le système clientéliste que nous dénonçons depuis des années est mis à jour", confirme Cédric Bottero, porte-parole du NPA. Trop c'est trop pour le PS ! "Le frère de Jean-­Noël Guérini, c'est son frère, lui c'est lui. La justice passera, tranchera, condamnera ou disculpera. Mais instrumentali­ser l'enquête en cours, c'est une politique de suspicion et d'amalgame", dénonce Jean-David Ciot.
Premier secrétaire délégué de la fédération socialiste, il contre-attaque : "En violant le droit à la présomption d'in­nocence sur le registre de la caricature et du "tous pour­ris", l'UMP ne joue pas en faveur de la démocratie. La droite refuse de débattre sur les grands enjeux et les compétences du département. En dégoûtant les gens d'aller voter, l'UMP impacte l'ensemble de la classe politique." Tout en se revendi­quant "d'une autre classe", Pierre Dharréville, 1er secrétaire du PCF, condamne lui aussi l'exploitation des affaires.
"Je ne suis pas juge. Nos propositions sont politiques, comme celles en faveur de la transparence de l'attribution des marchés publics." Manque de chance pour les communistes, le seul élu mis en examen, à ce jour, par le juge Duchaine, est un des leurs, le président de l'Agglomération du Pays d'Aubagne. "Rien ne me permet de douter de l'honnêteté et de la probité d'Alain Belviso", tranche Pierre Dharréville.
"A trop jouer avec le feu, l'UMP risque de se brûler, estime Christophe Madrolle du Modem. Sa stratégie va béné­ficier au vote contestataire, un peu à Europe Ecologie (EE) mais surtout au FN." Sébastien Barles, can­didat EE dans un can­ton disputé, attend lui aussi que "la justice soit passée pour se déterminer". Mais plaide pour des mesures "afin d'éviter le clientélisme, comme la critérisation des aides publiques…" Tout en s'étonnant de la virulence de l'UMP : "Renaud Muselier, secrétaire départemental, est un spécialiste de l'évasion fiscale ! En termes de conflit d'intérês, son opération immobilière à île Maurice, alors qu'il était secrétaire d'Etat aux Affaires étrangères, c'est quelque chose ! Comment peut-il jouer ensuite les che­valiers blancs ?" Reste une certitude. Après le scrutin, le pré­sident du Conseil général sera toujours… Jean-Noël Guérini.
                                                                                            Michel Gairaud

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28 février 2011

L'effarant système Guérini : Des liens avec la pègre…

guerini_lepointAvec un peu de patience, on finira bien par tout savoir. Quand on voit le séisme politique que Le Canard enchaîné a une fois de plus provoqué au sommet de l'Etat, il faut se réjouir que la presse aille mettre son bec dans tout ce qui barbote en eaux poisseuses. 
Le Point a publié mercredi un autre dossier de cinq pages sur l'affaire Guérini. Et ça y va ! Le magazine n'hésite pas à parler de "pègre locale", de "crime organisé" et de "gangsters". La veille de la parution, son auteur, Hervé Gattegno, répondait sur RMC aux questions de Jean-Jacques Bourdin. 

L'effarant système Guérini

L'enquête sur les marchés publics de l'agglomération marseillaise connaît de nouveaux développements - que vous révélez dans le Point. Elle dévoile des liens entre certains élus et la pègre locale. Pour vous, à Marseille, c'est la République qui est menacée.
Ce qui se passe dans la deuxième ville de France est particulièrement inquiétant. C'est une situation qui est plus proche des compromissions et des pratiques occultes du sud de l'Italie que des canons de l'éthique républicaine. Au départ, il y a des soupçons de malversations sur les marchés d'enlèvement des ordures et de traitement des déchets. En deux ans, l'enquête s'est élargie et Alexandre Guérini, le propre frère de Jean-Noël Guérini, le président du conseil général des Bouches-du-Rhône, l'un des hommes politiques les plus importants de cette région et le chef du PS marseillais, apparaît maintenant au centre d'un réseau qui intervenait sur de nombreuses décisions publiques dans les collectivités contrôlées par les socialistes : le département donc, et aussi la communauté urbaine de Marseille.
 
Donc c'est une énorme affaire de corruption. Pourquoi pensez-vous que ça va au-delà ?
Parce qu'il y a dans ce dossier des ingrédients qu'on croyait inimaginables depuis longtemps en France. D'abord, un pouvoir bâti sur la peur. Des fonctionnaires et même des élus témoignent qu'ils ont subi des pressions, des intimidations. Le président de la communauté urbaine de Marseille Eugène Caselli - qui a été placé en garde à vue au début du mois - a raconté qu'Alexandre Guérini installait un climat de menace, qu'il avait placé ses hommes aux postes clés pour intervenir sur les appels d'offres et qu'eux-mêmes avaient parfois peur pour leur sécurité. L'autre élément effarant, ce sont les connexions qui apparaissent avec le crime organisé. Avec par exemple des écoutes téléphoniques qui prouvent que des gangsters marseillais s'intéressaient aux autorisations des maisons de retraite, qui relevaient du conseil général. Et qu'on intervenait en leur faveur.
 
On va encore dire qu'à Marseille, ce sont des pratiques qui ont toujours existé... 
Justement, c'est bien ça qui est insupportable. C'est qu'il y a dans cette affaire une sorte de validation des clichés qui déshonorent la ville. Après les grèves à répétition qui en ont fait une ville économiquement sinistrée, Marseille a besoin de tout sauf de ça. Alors c'est vrai qu'il y a eu des précédents - toujours dans le Midi : Gaston Defferre traitait avec les voyous. À Nice, Jacques Médecin s'est appuyé jusqu'à la fin des années 80 sur des réseaux semi-mafieux. Et dans le Var, après l'assassinat de la députée Yann Piat, en 1994, une opération "mains propres" avait mis hors circuit une génération d'élus compromis. Il faudrait aujourd'hui des moyens similaires à Marseille. Donc une volonté politique. Pour l'instant, on ne la voit pas. Pas assez.
Vous voulez dire que l'enquête pourrait être étouffée ?
Étouffée non, mais ralentie, entravée. Privée de moyens. Et déconsidérée par la classe politique marseillaise - à une ou deux exceptions près. C'est vrai qu'on est en pleine campagne pour les cantonales, ce qui n'arrange rien. Et que Jean-Noël Guérini joue son maintien à la tête du département des Bouches-du-Rhône, ce qui n'est pas facile quand on a un frère en prison. Il est bien sûr présumé innocent, mais dans son intérêt - et dans celui de tous les Marseillais - il faudrait que le juge puisse l'entendre rapidement. Parce qu'il n'y a rien de pire qu'une enquête qui s'arrête à mi-chemin. Il faut maintenant que l'enquête aille jusqu'au bout. Qu'on sorte des suspicions - quitte à porter de vraies accusations. Et qu'on considère désormais qu'il ne s'agit plus d'une affaire marseillaise, mais d'une exigence nationale.

(Clic sur l'image pour agrandir)
Un autre article du Point lié aux affaires marseillaises
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26 février 2011

Quand la langue se corse entre les frères Guérini…

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Ça déballe à tout-va. Et plutôt sec même. Hier encore, La Provence mais aussi Valeurs actuelles faisaient état de nouvelles pistes à explorer, notamment au sujet d'une tentative de prise de contrôle d'un projet de maison de retraite. La chose n'aurait en soi rien d'étonnant vu la concurrence sauvage que se livrent les gros poissons, un peu comme pour certaines cliniques, si n'étaient évoqués de possibles liens avec le grand banditisme.
En l'occurrence, un nom revient, celui de Bernard Barresi, un "parrain marseillais" arrêté en juin dernier sur la Côte d'Azur et aussitôt écroué. Dans cette histoire de maison de retraite, on y cite de nouveau le nom d'Alexandre Guérini.
Pendant ce temps, la vie politique continue. Ainsi, lors de la conférence de presse pour la présentation des grandes lignes de Marseille 2013, Eugène Caselli était bien présent alors que Jean-Noël Guérini ne s'est pas montré. En revanche, la veille, il était venu à Aix signer une convention de partenariat avec Maryse Joissains qui l'a accueilli à porte-feuille grand ouvert.
A droite, c'est le sénateur Bruno Gilles, grand copain de Renaud Muselier, qui s'est fendu d'une lettre à Martine Aubry lui demandant de "suspendre Jean-Noël Guérini de toutes ses fonctions officielles au sein du PS 13". La demande aurait eu du sens s'il avait d'un même élan protesté auprès des dirigeants de l'UMP pour régler le sort des Alliot-Marie et Woerth. Mais non, il ne voit que d'un œil.

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Dans les secrets des frères Guérini
20 Février 2011 par Laurent Valdiguié

Enquête. Six écoutes téléphoniques entre Jean-Noël et Alexandre Guérini montrent qu’entre le 27 avril et le 2 mai 2009, les deux hommes ont été prévenus de l’ouverture d’une enquête judiciaire… Et qu’ils ont réagi.
A lire les comptes rendus sur procès-verbaux, mêlant transcriptions phonétiques du corse, onomatopées et bordées de jurons, on entend leur accent chantant du Sud. Se dégage aussi une drôle d'ambiance. "L’ambiance de la côte", résume un enquêteur.
Dans cette affaire aux ramifications multiples, impliquant une nébuleuse de sociétés soupçonnées de liens avec le grand banditisme, Alexandre Guérini a été mis en examen et écroué début décembre 2010 pour "blanchiment, abus de biens sociaux, détournement de fonds et de biens publics et corruption active". Son frère Jean-Noël, sénateur et patron des socialistes de Marseille, a toujours défendu son
 "indépendance"… Jusqu’où tiendra-t-elle ?
Devant des militants socialistes, Jean-Noël Guérini a répété qu’il"n’avait absolument rien à se reprocher"
 et dénoncé une "campagne qui vise à salir et à détruire". France-3 Provence-Alpes venait de révéler le contenu d’une drôle d’écoute téléphonique. Dans celle-ci, Jean-Noël Guérini, le 27 avril 2009, prévenu par un mystérieux "ami", avait alerté son frère de l’ouverture d’une enquête le visant. En fait, ce jour-là, les gendarmes ont enregistré cinq écoutes téléphoniques que le JDD a pu consulter.

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Les deux frères, apparemment par peur des écoutes, alternent le corse et le français. Ce même 27 avril, ils se reparlent à 16h41, uniquement en langue corse, que les gendarmes transcrivent phonétiquement. Sauf pour quelques jurons d’Alexandre ("ce fils de pute", "c’est vraiment une salope, hein !"). Jean-Noël le reprend : "Parle en corsu, enfin !"
"C’est un enculé quand même"
A 17h15, nouvel appel. "C’est un enculé quand même, s’énerve cette fois-ci Jean-Noël. Mais enfin, il ne faut rien dire. Je peux rien dire parce que, bon, c’est mon ami qui me le signale", explique-t-il. Les gendarmes, sur la ligne, comprennent que le secret de leur enquête est éventé par ce fameux "ami". "Il me dit que l’enquête préliminaire sera ouverte, continue Jean-Noël. A mon avis, ça doit être pour les décharges, Alex… 
– Eh, qu’est-ce que tu veux que ce soit ? rétorque Alexandre.
– Hum… Mais de toute façon, au bout de trois ans, y a prescription, ils peuvent rien faire, se rassure Jean-Noël.
– Mais qu’est-ce qu’on s’en cague ! 
– Ouais. 
– Si je te dis que j’ai rien à me reprocher, je sais de quoi je parle, non ? 
– Ouais, ouais, ouais, absolument. 
– Mais moi, je suis pas soulagé, je te l’ai dit tout à l’heure, je m’en bats les couilles. Ça peut venir même en parachutiste, qu’est-ce que je m’en bats les couilles ! Ils le savent, tous ces fils de pute !", conclut Alexandre Guérini.
Juste après cette conversation, le plus jeune des Guérini,
 "qui n’a rien à se reprocher", appelle, à 17h27, Philippe Rapezzi, un de ses collaborateurs à SMA Environnement. "Il ne faut rien laisser traîner, d’accord ? indique Guérini. Dans le coffre, y a rien ? 
– Euh, non, y a rien. 
– Ben voilà ! – D’accord, je pense que tout est bon", déclare Rapezzi, qui se veut rassurant.
Peut-être vaguement soucieux, Alexandre Guérini rappelle son frère à 17h30.
 "Demande quand même le service que c’est", lui dit-il pour savoir quel service d’enquête a été désigné, "le marseillais ou le parisien". Jean-Noël répète qu’il doit voir son informateur le lendemain et "qu’il saura tout dans les détails, avant d’ajouter : Y a pas de souci…" Le ton est plutôt interrogatif. "Si j’étais inquiet, mon frère, je serais en train de redescendre à Marseille… J’en ai rien à branler."
Soudés dans l'épreuve  
Suite à cette dernière conversation enregistrée le 27 avril, les deux frères cesseront de parler au téléphone pendant cinq jours. Les gendarmes n’entendront donc pas le récit de Jean-Noël à Alexandre après son rendez-vous avec son mystérieux "ami informateur" le 28 avril.
L’écoute suivante est datée du 2 mai 2009. Cette fois, Jean-Noël Guérini a le blues. Est-ce à cause de l’affaire judiciaire en cours ?
 
"J’ai plus envie… Ça me fait chier, je te jure… Je ne suis pas marié avec la politique, oh, depuis 1977… Pffou, j’en ai marre".
Son frère Alexandre va s’employer à lui remonter le moral : "Ouais, t’en as marre, t’en as marre, t’en as marre… tout le monde en a marre ! Y a pas que toi qui en as marre, tout le monde en a marre, mais si on règle tous les problèmes avec 'ah, j’en ai marre', et ben, les problèmes, ils se règlent pas comme ça, et chaque fois que tu règles un problème, hop, y en a un autre le lendemain qui surgit, et, hop, tu le règles et le lendemain, tu en as un autre qui surgit et hop, c’est la vie qui est comme ça ! c’est la vie. […] Voilà, moi, je sais que c’est ma vie et que je serai toujours en acier, je laisserai jamais tomber, jusqu’au dernier jour de ma vie, ben, je laisserai jamais tomber, je me battrai tout le temps. 
– Oui, le coupe Jean-Noël, mais toi, tu as une constitution à part. 
– Non, c’est pas une constitution, mon frère, c’est pas une constitution, c’est une réflexion intellectuelle." Ils sont comme ça, les frères Guérini. Soudés dans l'épreuve. 
Ce 27 mai, ils se remontent mutuellement le moral pendant un quart d’heure sans savoir que les enquêteurs du juge Charles Duchaine sont à l’écoute.
 
"Je peux être au fond d’un trou en train de manger du pain sec avec des cancrelats, je perdrai jamais le moral", assure Alexandre.
Les deux frères évoquent ensuite longuement l’auteur présumé de la lettre anonyme au procureur. En termes peu flatteurs.
 "Il a fait une erreur, et cette erreur, il fallait pas qu’il la commette… Là, il a touché à quelqu’un qu’il fallait pas qu’il touche, jure Alexandre.
– Absolument", conclut son frère.
Et on devine, à la lecture de ces lignes, qu’à Marseille, les couteaux resteront tirés encore longtemps.

25 février 2011

Une "grève des poubelles" pilotée par Guérini ?

ordures_panneau___CopieL'affaire Guérini semble prendre une tournure décisive.
Mediapart publie des éléments d'information qui risquent de faire mal. Que peuvent bien valoir désormais toutes les réactions indignées des protagonistes ? Leurs divers échanges téléphoniques pourraient constituer des pièces à conviction. On saisit maintenant un peu mieux ce qui s'est passé lors de la grève "spontanée" d'octobre 2009 à Marseille. Dans les coulisses, on s'activait ferme pour balayer les règles du jeu d'un marché de déchets. Aïe, pas bien propre tout ça, si l'on peut dire. Et que dire du langage pas franchement trié non plus. Ambiance…

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Affaire Guérini :
Les deux frères pris dans la «grève des poubelles» à Marseille
23 Février 2011 Par Louise Fessard

Nouveau rebondissement dans l'affaire Guérini : des écoutes récemment versées au dossier sur les marchés truqués des Bouches-du-Rhône éclairent le rôle actif joué par Alexandre Guérini, entrepreneur spécialisé dans les déchets, et de son frère Jean-Noël, président socialiste du conseil général des Bouches-du-Rhône, dans le conflit des poubelles de novembre 2009 à Marseille.
Le jeudi 29 octobre 2009, une centaine de salariés de la société privée Bronzo se mettent en grève parce que leur entreprise n'a pas été retenue dans le cadre d'un appel d'offres lancé par la communauté urbaine. Cet appel portait sur la collecte des déchets dans le centre-ville de Marseille. Les employés bloquent les centres de transfert par lesquels transitent habituellement les déchets et, en quelques jours, les tas d'ordures s'accumulent dans tout Marseille.
Les enquêteurs soupçonnent aujourd'hui Alexandre Guérini, entrepreneur spécialisé dans le traitement des déchets et frère du président PS du conseil général des Bouches-du-Rhône, d'avoir provoqué cette grève en faisant fuiter des documents confidentiels.
Dans son ordonnance de placement en détention provisoire d'Alexandre Guérini du 1er décembre 2010, le juge des libertés et de la détention explique que «la communication (...) à Alexandre Guérini du rapport administratif, qui proposait Bronzo comme le meilleur candidat, facilitait sa connaissance par les employés de la société Bronzo, évincée du marché, qui entamaient un mouvement de grève afin qu'Eugène Caselli ne suive pas la décision de la commission d'appel d'offres qui avait écarté l'offre de Bronzo».
Pire, d'après plusieurs écoutes, Jean-Noël Guérini, accompagné de son frère, aurait rencontré, le 29 octobre, Eugène Caselli, président PS de la communauté urbaine Marseille Provence Métropole (MPM) afin de faire pression sur lui pour qu'il annule ce marché qui leur déplaisait.

«Je m'en bas les couilles de la commission.»

gif_poubelleLe 27 octobre 2009, Alexandre Guérini, mécontent de la décision de la commission d'appel d'offres de MPM, appelle Antoine Rouzaud, vice-président de MPM délégué à la propreté et au traitement des déchets pour le prévenir qu'il va «choper (Eugène Caselli) jeudi soir avec Jean-Noël, tu vois, je vais lui en dire deux mots devant Jean-Noël».
Le 29 octobre 2009, jour du début de la grève, Alexandre Guérini appelle à 8h08 le directeur général délégué de Bronzo, Michel Quilichini, pour s'enquérir de l'état du conflit, alors que celui-ci n'est pas encore relayé dans les médias. Les deux semblent de mèche pour souffler sur les braises. 
«Alexandre : 
Est-ce que le deuxième centre de transfert a été bloqué ?
Michel : Pas encore mais ça arrive.
Alexandre : Bon, il faut un "tiens bon" là-bas hein !
Michel : Ah ça c'est sûr. (...)
Alexandre : Eh ben c'est bien. Dis à Charly (un des employés de Bronzo) qu'il tienne hein !
Michel : Oui, oui, non mais...
Alexandre : Tu lui as tout expliqué hein ?
Michel : Voilà.
Alexandre : D'accord, allez à tout à l'heure, tu me tiens au courant.»
Ce même jeudi, Alexandre Guérini rappelle le patron de Bronzo à 21h48 et lui laisse un message pour lui raconter son rendez-vous avec Eugène Caselli et son frère Jean-Noël, dans le bureau de ce dernier au conseil général des Bouches-du-Rhône. Il expose aussi sa stratégie pour faire annuler le marché.
«Bon je suis sorti maintenant à l'instant du bureau de mon frère avec qui tu sais (Eugène Caselli), raconte-t-il à l'entrepreneur. Il a rien voulu entendre, il a peur pour sa sécurité. Heu, simplement pour te dire que je pense qu'il faut un “tiens bon” et il faut que, heu, il n'y ait pas que ça. Il faut une démarche juridique, heu, je vais me rapprocher d'Olivier Grimaldi (l'avocat d'Alexandre Guérini et officiellement conseil de MPM) pour essayer de voir si les ouvriers et l'entreprise ne peuvent pas déposer une plainte (...) pour la diffusion de la première analyse. Bon demain je vais en Corse mais si jamais, samedi matin, on peut se prendre un petit-déjeuner, heu, tranquillement quelque part. Tu peux m'appeler demain quand tu veux, merci au revoir.»
Puis à 21h59, Alexandre Guérini appelle son avocat Olivier Grimaldi, à l'époque également conseil de MPM sur les questions de déchets.
«Olivier : 
Ça va ?
Alexandre : Oh, je suis parti maintenant du conseil général...
Olivier : Ouais.
Alexandre : 
J'ai discuté avec cet imbécile (Eugène Caselli) depuis 19 heures 30...
Olivier : Ouais.
Alexandre : 
Je ne suis pas arrivé à lui faire entendre raison, il a peur pour sa sécurité.
Olivier : Ouais c'est ça.
Alexandre : Il ne veut pas aller contre la décision de la commission d'appels d'offres (...) Il me dit “Je préfère avoir mes problèmes de grève que ces problèmes judiciaires”. Je lui dis “Mais tu ne vois pas que tu n'as rien compris. Tu ne vois pas que tu as donné les clés de la propreté de la Ville de Marseille à Renaud Muselier (député UMP et éternel dauphin de Jean-Claude Gaudin) ! Tu te rends pas compte de ce que tu es en train de faire ? Tu bafoues tes services, tu t'en bats les couilles de FO ! Tu te rends compte de ce que tu as fait, tout ça parce que tu as peur d'être inquiété.»
Puis il appelle Michel Karabadjakian, directeur adjoint chargé de la propreté à MPM. «Je viens de sortir, je t'ai pas pris au téléphone parce que j'étais avec Olivier Grimaldi, lui précise-t-il à 22h06. Je lui ai raconté tout mon entretien de deux heures et demie, qui n'a rien donné parce qu'il (Eugène Caselli) s'est chié dessus. Mon frère l'a poussé dans ses retranchements en lui disant “Mais putain d'Adèle, moi, je m'en bats les couilles de la commission !”.»

«Je vais lui arracher la tête.»

logo_BronzoAlexandre Guérini suggère alors au patron de Bronzo, Michel Quilichini, d'envoyer une lettre à Eugène Caselli au nom de ses ouvriers, dans laquelle ils expliqueront que, puisque le rapport d'analyse des offres a été diffusé, le marché est faussé et doit être annulé. «Et la lettre, il faut pas qu'ils la fassent eux, il faut que ce soit Olivier (Grimaldi) qui la rédige, ordonne-t-il à Michel Quilichini. (...) Et à l'appui il donne le double du rapport d'analyse qu'il se procurera ou qu'il a déjà entre ses mains, le jeune
Pour plus de sûreté, le matin du 30 octobre, Alexandre Guérini charge son ami Eric Pascal, patron de l'entreprise de tri des déchets Queyras Environnement, d'aller porter une lettre demandant le rapport d'analyse en question à Michel Karabadjakian.
«Tu lui remets ce courrier et une fois qu'il l'a lu, tu lui reprends et tu le déchires devant lui», explique-t-il à Eric Pascal. Michel Karabadjakian se rebiffe et la manœuvre semble échouer.
Le 2 novembre 2009, Alexandre Guérini envoie un SMS à son frère :
«Dis à Brushing (le surnom donné à Eugène Caselli) de ne (pas) notifier les marchés. Urgent
Le 3 novembre, l'homme d'affaires met Jean-Noël Guérini au courant de ses dernières manœuvres pour tenter de faire annuler le marché. «Olivier Grimaldi a passé trois heures de psychanalyse avec lui (Eugène Caselli), il l'a convaincu au moins de municipaliser le premier arrondissement (dont la mairie est tenue par le PS) et de laisser le quatrième (tenu par l'UMP) attribué à des entreprises qui sont contre nous, enfin bref, c'est pas grave on s'en bat les couilles de ça. Heu donc et là demain matin, Olivier Grimaldi va le revoir pour lui faire l'argumentation qu'il va développer lors de la conférence de presse qu'il va donner.»
Jean-Noël Guérini, qui semble furieux d'avoir été embringué dans l'affaire, fait alors machine arrière toute :
«Mais non, qu'on ne me mette pas dans le coup, je ne veux pas en entendre parler premièrement. Deuxièmement, je ne veux rien entendre, alors il se démerde cet enculé (Eugène Caselli). (...) Je ne veux plus qu'on parle de moi dans ça, voilà, c'est clair ! Il se démerde voilà ! Maintenant il se démerde complètement ce connard ! Et qu'on ne se serve pas de mon nom !» Et de conseiller à son frère, mais un peu tard : «Mais toi-même, ne t'en occupe pas, laisse-le faire Jean-Noël Guérini semble inquiet des retombées de l'activisme d'Alexandre.
«Jean-Noël : 
Tout le monde dit "Mais il y avait Alexandre qui était là !". Attends, attends, tu comprends ce que je veux dire.
Alexandre : Mais où il y avait Alexandre ?
Jean-Noël : Mais qui avait reçu tel ou tel employé, voilà.
Alexandre: Mais attends, ça fait 20 ans que je les connais! Ça fait 20 ans que je les cotoie.
Jean-Noël : Hum.
Alexandre : De quel droit, est-ce que c'est défendu de rencon... On est quand même dans une République ? Est-ce que c'est défendu de rencontrer du monde ?
Jean-Noël : Non, non.(...)
Jean-Noël : 
Non, mais moi je ne vais pas lui (Eugène Caselli) téléphoner, parce que je vais le traiter de tout, mais moi je ne veux plus que l'on parle de quoi que ce soit avec moi, je vais lui arracher la tête, voilà! 
Alexandre : Eh ben, ne lui arrache rien avant demain.»
Et le 4 novembre 2009, Eugène Caselli, qui une semaine plus tôt se fâchait tout rouge devant les médias estimant qu'il n'était «pas tolérable que 100 personnes prennent en otages 850.000 Marseillais», cède contre toute attente aux «preneurs d'otages» (les salariés de Bronzo).
Il annonce, lors d'une conférence de presse, déclarer «sans suite» le marché, une décision exceptionnelle qui équivaut à l'annulation du processus et au lancement de nouveaux appels à candidatures. Ce revirement suprenant lui a sans doute valu son audition par les gendarmes sous le régime de la garde à vue début février.
Jean-Noël Guérini lui n'a toujours pas été convoqué par le juge Duchaine. Il aura du moins du mal à le convaincre qu'il ignorait «la teneur exacte» des «contacts ou des relations» de son frère avec ses collaborateurs, comme il l'a affirmé le 18 février devant les militants PS. 

24 février 2011

Alexandre Guérini et ses amis avocats...

guerini_alex_bouletHier, La Provence revenait sur le cas Alain Belviso. Et sur ses déclarations lors de sa démission de ses mandats électifs où il disait que l'on fouillait sur ses "activités personnelles et professionnelles".
L'allusion portait sur la double garde à vue il y a une semaine d'un fonctionnaire de la mairie d'Aubagne et d'un architecte qui intervenaient auprès de la société privée dirigée par Belviso.
Y aurait-il eu quelque mélange de genres entre affaires privées et affaires publiques ? Serait-ce la fumée d'un autre feu ? La justice veut savoir.
Avant-hier, toujours dans La Provence, était aussi posée la question du coût de l'affaire des marchés truqués. Au fait, oui, à combien s'élève la facture pour Marseille Provence Métropole ? "Cela aurait coûté au minimum 5 millions d'euros", avance le journal sur la base des éléments connus à ce jour. Mais comment est-ce possible ? Quoi, on aurait donc trafiqué ?
Mediapart raconte comment Alexandre Guérini aurait tenté d'imposer ses amis avocats pour contrôler quelques "bonnes" affaires. (d'autres détails encore plus fracassants demain)
Tout cela ne peut sentir que les bonnes œuvres, n'est-ce pas ? C'est sur le sens de cette générosité qu'ironise Le Canard enchaîné d'hier. (voir en bas d'article)

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Des avocats placés par Alexandre Guérini ?
20 Février 2011 Par Louise Fessard

L'enquête sur les marchés publics des Bouches-du-Rhône montre que l'homme d'affaires Alexandre Guérini a sollicité à plusieurs reprises des avocats, censés conseiller des collectivités locales, pour défendre ses propres intérêts ou ceux d'amis.
Le rôle joué par deux avocats, l'un parisien, Régis de Castelnau, l'autre marseillais, Olivier Grimaldi, soulève en effet plusieurs questions. Tous deux, spécialisés dans le droit public, sont des proches d'Alexandre Guérini, mis en examen début décembre 2010 pour «abus de biens sociaux, détournement de biens publics, recel et blanchiment, corruption activeet détention de munitions», et placé en détention provisoire.
Olivier Grimaldi conseille, entre autres, la ville de Marseille, le syndicat des territoriaux FO, les groupes de supporters de l'OM et jusqu'à encore récemment la communauté urbaine Marseille-Provence-Métropole (MPM). Cette dernière a décidé, fin décembre 2010, de se passer de ses services, lorsqu'elle a découvert qu'il défendait également Alexandre Guérini, l'exploitant de plusieurs décharges et déchetteries du département.
Le 2 février 2011, Olivier Grimaldi a été entendu par les gendarmes, sous le régime de la garde à vue (en compagnie du président PS de MPM, Eugène Caselli, de Franck Dumontel, ancien directeur de cabinet d'Eugène Caselli, démis de ses fonctions en décembre, et d'Éric Pascal, patron d'une société de traitement de déchets, déjà mis en examen dans un autre volet de ce dossier).
Dans un courrier adressé au juge d'instruction Charles Duchaine le 17 février 2010, Olivier Grimaldi se présente comme le conseil de la SMA Vautubière, une des sociétés d'Alexandre Guérini. Il réclame la restitution d'une Mercedes appartenant à la société et de documents comptables saisis en novembre 2009 dans le cadre de l'enquête par les gendarmes. La proximité entre Olivier Grimaldi et l'homme d'affaires est un peu gênante puisque, par ailleurs, l'avocat conseillait activement MPM sur les questions de tri et de collecte des déchets.
Interrogé par les gendarmes fin novembre 2010, l'ancien directeur de la propreté de MPM, Michel Karabadjakian, avait même évoqué «un possible conflit d'intérêts». Il explique qu'Alexandre Guérini aurait sollicité Olivier Grimaldi «au moins à quatre reprises» pour rédiger des analyses juridiques facturées à MPM. Trois de ces interventions, selon la description faite par Michel Karabadjakian aux enquêteurs, semblaient viser à écarter des entreprises des marchés de déchets de la communauté urbaine au profit de la société de collecte Bronzo, une filiale du groupe Veolia.
À deux reprises, en juin et en octobre 2009, le président de MPM, Eugène Caselli, déclare sans suite des décisions de la commission d'appel d'offres attribuant des marchés à des concurrents de Bronzo. À chaque fois en s'appuyant sur des notes juridiques fournies par Olivier Grimaldi.
Aucune des sociétés d'Alexandre Guérini n'a jamais cherché à travailler pour MPM. Mais sur l'un des marchés qui furent annulés, la société Bronzo était associée à Queyras Environnement, une entreprise gérée par Eric Pascal, un proche d'Alexandre Guérini et un ancien salarié de Bronzo. «Eric Pascal s'était engagé à verser le volume de ce qui ne pouvait être valorisé, c'est-à-dire 20% environ du volume global, sur les décharges d'Alexandre», a expliqué Michel Karabadjakian aux enquêteurs.
Par ailleurs, Alexandre Guérini  était associé avec le frère d'Eric Pascal, Gilles, au sein de la SMA Propreté, une société créée par les deux hommes en 2007 pour s'occuper de déchetteries.
gif_balaiY a-t-il effectivement eu conflit d'intérêts entre les activités de conseil d'Olivier Grimaldi à Alexandre Guérini et celles de conseil à MPM ? Est-ce la raison pour laquelle il a été mis en garde à vue par les gendarmes le 2 février ? Contacté, Olivier Grimaldi n'a pas souhaité répondre à ces questions. «J'aspire juste à retrouver de la sérénité», a-t-il répété. «Pour l'instant, je ne constate nulle part des violations aux règles de la profession», répond quant à lui le bâtonnier de Marseille, Jérôme Gavaudan, qui juge «choquante» l'interpellation «au petit matin d'un avocat, qui a pignon sur rue, alors que les avocats n'ont pas l'habitude de se soustraire aux réquisitions du parquet ou du juge».
On retrouve Olivier Grimaldi dans les écoutes révélées lundi par Le Parisien. Fin juillet 2009, Alexandre Guérini, qui dirige la SMA Vautubière, société chargée par l'Agglopole Provence (dix-sept communes dont Salon-de-Provence et Berre-l'Etang) d'exploiter la décharge de la Fare-des-Oliviers, tente de négocier une baisse de la redevance qu'il verse à l'Agglo (une partie de la décharge reçoit des déchets privés).
L'entrepreneur aimerait placer son «ami», Régis de Castelnau, par ailleurs avocat du Conseil général et de MPM, comme conseil de la partie adverse, l'Agglopole Provence. «J'ai envie de leur faire prendre de Castelnau», dit-il le 7 août 2009 à son avocat Olivier Grimaldi. «Et on négocie avec notre ami de Castelnau, tu as compris le schmilblick», insiste-t-il.
Plus avant dans la conversation, il explique : «Je vais les mettre en difficulté et je veux une négociation, et la négociation, elle doit être forcée politiquement et on doit choisir notre (avocat), et ils doivent choisir leur avocat, et leur avocat ça doit être de Castelnau. Il faut qu'on leur mette la pression dessus à ces enculés.» À plusieurs reprises, Olivier Grimaldi semble approuver la stratégie.
Ce même 7 août, Alexandre Guérini appelle ensuite Régis de Castelnau. «Comme je leur conseille de se rapprocher de leur conseil, heu qui pourra également se rapprocher de moi et peut-être que la négociation des deux avocats, hormis le fait que derrière tu vas imprimer une pression politique pour que l'accord se fasse, tu vois...», le briefe-t-il. «Parce qu'à ce moment, de Castelnau négocierait pour l'Agglopole, et toi, tu négocierais avec Grimaldi pour SMA», résume-t-il. «Ben, ce serait l'idéal ça», répond Régis de Castelnau.
Et Alexandre Guérini de préciser : «Hein voilà, de toutes façons, j'espère que tu seras payé par la communauté d'Agglo et s'ils te payent pas ces enculés, je te payerai moi
Régis de Castelnau a-t-il réellement accepté de devenir le conseil de l'Agglopole tout en défendant les intérêts de la partie adverse, la SMA Vautubière d'Alexandre Guérini ? Il ne nous a pas répondu.
D'après Michel Tonon, le président PS de l'Agglopole Provence interrogé mardi par l'AFP, le plan d'Alexandre Guérini aurait échoué. «Le montant de la redevance n'a pas été baissé et, non, je n'ai eu aucune intervention politique en ce sens. Il a payé tout ce qu'il devait», dit l'élu. Michel Tonon dément également avoir eu recours à Régis de Castelnau. «On a hésité à le prendre car il avait été notre avocat dans le passé mais compte tenu du contexte, on ne l'a pas fait et on en a pris un autre», a-t-il affirmé.
Là aussi, le bâtonnier Jérôme Gavaudan répond qu'il «ne constate pas, à ce stade, de manquements graves aux principes de la profession» et qu'il «faut laisser l'enquête suivre son cours». De son côté, MPM se contente de confirmer que «Me Grimaldi et Me de Castelnau ne se sont pas vu confier de dossiers par la communauté urbaine depuis fin 2010».
Dans cet étrange mélange des genres, les avocats qui défendent aujourd'hui Alexandre Guérini ne sont autres qu'Emmanuel Molina, associé d'Olivier Grimaldi, et Florence Rault, l'unique associée de Régis de Castelnau. «Quand on commence à s'attaquer à qui est l'avocat de qui et pourquoi, c'est inquiétant pour la démocratie : il faut plutôt faire confiance aux avocats que penser qu'ils peuvent participer aux violations des règles», réplique Jérôme Gavaudan.

(Clic sur l'image pour agrandir)
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