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le Blog de Lucien-Alex@ndre CASTRONOVO
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24 juin 2011

Affaire Guérini : Le spectre de la pègre ("Le Point")

guerini lepoint couv 9Un article en forme de gros coup du Point (du 9 juin) sur "les liaisons dangereuses de l'affaire Guérini". Tous les ingrédients, ou presque, d'un scénario de film sont réunis, mais pas encore le dénouement de l'intrigue.
Comme on a encore pu s'en rendre compte ces dernières quarante-huit heures, il se passe toujours quelque chose à Marseille. Deux exemples édifiants.
Avant-hier, c'est la surprenante nomination, suivie d'une fulgurante promotion, d'une fonctionnaire au sein de Marseille Provence Métropole, qui était contestée devant le tribunal administratif. Christiane Argy est l'épouse de Claude-Elie Argy, secrétaire général de FO-Territoriaux, homme de pouvoir et d'influence.
Et, hier, c'est l'ancien directeur de cabinet de Jean-Noël Guérini, et ancien président de 13 Habitat, actuellement conseiller général, Jean-François Noyes, qui a passé plusieurs heures en garde à vue pour s'expliquer au sujet de la préemption par le conseil général des Bouches-du-Rhône du terrain litigieux de La Ciotat devenu une décharge gérée par Alexandre Guérini.
Voilà. Et maintenant, revenons-en au Point de départ... Haletant !

Les liaisons dangereuses de l'affaire Guérini
Par Hervé Gattegno

Révélations.
L'enquête sur le marché des déchets de l'agglomération marseillaise dévoile les troubles connexions entre la politique et le milieu.
L'échange date d'avril 2010. Quelques semaines avant son arrestation sur un yacht amarré dans le port de Golfe-Juan, le truand Bernard Barresi parle au téléphone avec un mystérieux "Patrick". Tous deux ignorent que des policiers surveillent la ligne.
"On vient de bloquer les comptes de l'excité", lui dit l'inconnu.
"
Ça remonte jusqu'à nous ou pas ?" s'inquiète Barresi.
"Non."
Un an a passé et le soulagement du gangster n'est plus de mise. La transcription de ce dialogue secret est en passe de devenir la pièce à conviction la plus explosive de l'enquête sur le "système Gué­rini". Un réseau de pouvoir, d'ar­gent et d'influence où l'intérêt public semble parfois se confondre avec des intérêts mafieux, où la politique voisine avec le banditisme.
Au palais de justice de Marseille, les investigations consacrées au gangster Barresi, menées par le juge Philippe Dorcet, ont fini par croiser l'instruction du juge Char­les Duchaine, qui explore les des­sous des marchés publics mar­seillais. Les policiers ont en effet la certitude que "l'excité" n'est autre qu'Alexandre Guérini, in­dustriel local spécialisé dans le traitement des déchets urbains qui est aussi le frère de Jean-Noël Guérini, sénateur (PS) et président du conseil général des Bouches-­du-Rhône.
Ciblé par la justice, qui le soup­çonne de diverses malversations, Alexandre Guérini a bel et bien été l'objet, en 2010, de saisies ban­caires en Suisse et au Luxembourg, où il dissimulait d'importantes sommes. L'inquiétude de Barresi laisse penser qu'une partie au moins de ces fonds lui était desti­née. "Les avoirs déposés pourraient être d'origine criminelle", indique ainsi un rapport de la justice hel­vétique récemment adressé au juge Duchaine, après examen des comp­tes d'Alexandre Guérini. Remis en liberté le 18 mai (après cinq mois et demi de détention), ce dernier est considéré comme le pivot du scandale des ordures qui empoisonne l'air de Marseille depuis plus de deux ans.
guerini phrases lepoint"Alex", ses amis le décrivent comme un homme rugueux mais affable, fort en gueule et en affai­res, autoritaire et généreux à la fois, à l'image de Tony Soprano, héros d'une série télévisée améri­caine qu'il apprécie, qui dirige avec la même poigne sa déchetterie, sa famille et son gang.
Les autres, élus, fonctionnaires ou subordonnés, parlent d'Alexan­dre Guérini avec crainte, évoquant en termes similaires la "peur" et les "tensions physiques" qu'il peut susciter lorsqu'il cherche à impo­ser ses vues. "Si tu t'entêtes, tu sais que la famille Guérini, ils sont encore plus entêtés que toi !" l'entend-on menacer dans l'une des innombra­bles écoutes téléphoniques versées au dossier. Quant à son frère, homme fort du PS marseillais aujourd'hui éclaboussé par la ma­rée montante des affaires, il se proclame étranger à ses activités. "Je suis lié à Alexandre par le sang, confiait-il au Point il y a trois mois. Mais, s'il a commis des fautes, il devra en repondre."
Pourtant, la classe dirigeante locale a toujours vu les Guérini faire tandem, s'épaulant l'un l'autre pour grimper les marches du pou­voir et de la réussite. Comment croire que l'aîné devenu si puissant ait pu ignorer les manigances et les fréquentations du cadet, quand mille témoignages attestent qu'il le laissait régenter son cabinet et se mêler de tout, jusqu'aux nomi­nations et aux appels d'offres ?
Au reste, les livres d'histoire méridionale sont emplis de ces clichés en noir et blanc qui racon­tent les unions sulfureuses d'antan, quand les édiles et le milieu 888 faisaient cause commune. Le sénateur Maurice Arreckx régnait sur le Var avec le caïd toulonnais Jean-Louis Fargette ; Jacques Médecin se partageait Nice avec le casinotier Jean-Dominique Fratoni; et Gaston Defferre s'appuyait au besoin sur les frères Venturi pour rester le maître de Marseille. Rien ne permet, à ce jour, d'inscrire le nom des Guérini au bas de la liste. Rien sauf des indices...
Cette autre écoute téléphonique, par exemple : datée du 28 avril 2010, elle surprend un dialogue sibyllin entre Michel Campanella, un lieutenant de Barresi, et l'un de ses comparses.
"J'ai oublié de te faire une commission, con, dit l'homme de main à son chef. L'Arabe, il m'a dit que tu appelles le chauffeur de bus en urgence."
"Quel Arabe ?"
"L'Arabe que j'ai vu samedi. Tu vois pas qui c'est ?"
"Non. Je dois l'appeler ?"
"Je vais lui demander parce qu'il voulait te voir en urgence pour les appels d'offres..."
Les enquêteurs n'ont pas su qui était le "chauffeur de bus" ni quels "appels d'offres" pouvaient intéresser d'aussi près des malfrats fichés au grand banditisme, mais l'impression est restée. D'autres interceptions révèleraient l'existence de contacts - directs ou indirects - entre Alexandre Guérini et Bernard Barresi, alors que celui-ci était recherché depuis dix-huit ans (et condamné par contumace en 1994 pour l'attaque d'un fourgon blindé). Si les dossiers judiciaires n'en recèlent encore aucune trace, l'écho de ces conversations secrètes s'est déjà propagé dans toute la ville.
"Je ne connais pas Bernard Barresi", a pourtant certifié Alexandre Guérini au juge Duchaine. Il est toutefois acquis qu'il a imposé à l'office HLM des Bouches-du-Rhône qu'un appartement soit réservé à l'ex-femme du gangster. Le 12 mai 2009, la conseillère char­gée des attributions de logement confiait au téléphone : "Pour votre info, Alexandre, je l'ai informée, pour Barresi, qu'à la fin du mois normale­ment on aurait le logement, qu'elle serait contactée - et qu'elle m'appelle s'il y a quelques petits travaux..."
Deux mois plus tard, le même Guérini ordonnait au directeur de cabinet de son frère d'écarter une demande d'agrément pour l'ouver­ture d'une maison de retraite à La Ciotat. Comme Le Point l'a révélé (le 24 février), l'instruction donnée - "Il faut pas leur donner l'autorisa­tion parce que, heu, ce sont des mecs qui vont emmerder Jean-Noël..." - ­revenait à faire place nette à un projet concurrent. Un projet poussé, dans l'ombre, par Barresi en personne ! A cette époque, plusieurs filatures des protagonistes conduisaient les policiers jusqu'à la mairie de la commune, où un fonctionnaire suivait leur dossier avec bienveillance. Les surveillan­ces téléphoniques, elles, montrent que le gangster ne s'inquiétait guère pour l'obtention du feu vert définitif.
"Auriez-vous vos entrées au conseil général ?" ui a demandé le juge Dorcet. "Je n'ai aucune entrée au conseil général", a tranché Barresi. Il en avait peut-être ailleurs : le jour de son arrestation, la police a re­trouvé, dans une sacoche aban­donnée par un de ses visiteurs dans sa fuite, les cartes de visite et les coordonnées de nombreux entre­preneurs et de plusieurs élus.
guerini phrases lepoint - CopieAutre révélation de l'enquête : Alexandre Guérini était aussi en relation étroite avec l'énigmatique "Patrick", l'homme qui renseignait au téléphone le parrain en cavale : Patrick Boudemaghe, un gérant de société de 52 ans, au physique passe-partout, front dégarni et fine moustache, dont les affaires se partageaient entre la région mar­seillaise et l'Andalousie.
Interpellé dans sa villa de Ma­laga et aujourd'hui emprisonné, Boudemaghe servait à la fois d'agent de liaison et d'affaires à Barresi. Entre le 1er décembre 2009 et le 1er mars 2010, la police a relevé 87 appels entre les deux hommes. "C'est un pote à moi, a dit le gangster au juge Dorcet. Mais je ne peux pas parler d'écoutes qui ne figurent pas au dossier."
"
Détournements".
En paral­lèle, l'entreprenant Boudemaghe avait aussi monté avec son ami Da­mien Amoretti une petite entre­prise de construction. Baptisée ABT, cette société a obtenu, de 2000 à 2010, de nombreux marchés publics auprès des collectivités des Bou­ches-du-Rhône - et notamment du conseil général et de ses satellites, tous dirigés par des proches des frères Guérini. Ces dernières an­nées, les juteux contrats d'une can­tine scolaire et d'un club pour per­sonnes âgées à Marseille, d'une caserne de pompiers à La Ciotat et même d'une gendarmerie à Orgon sont tombés dans son escarcelle.
Le siège d'ABT était situé dans une villa isolée de la campagne aixoise, à Gardanne, dont les enquêteurs savent qu'elle servait aussi de repaire à Bernard Barresi... A la même adresse figurait d'ailleurs une autre structure prospère : Alba Sécurité, société de surveillance dotée, sur le papier, de 143 salariés et dont la gérante officielle était la compagne attitrée du voyou marseillais. Longtemps, Alba Sécurité a trusté les contrats publics de gardiennage à Marseille et alentour : des archives départementales (1 million d'euros par an) aux cités HLM et jusqu'à certains bâtiments annexes du conseil général lui-même (4,5 millions par an) - sans oublier la fourniture de stadiers à l'OM les soirs de match...
Ainsi placé au cœur du réseau Barresi, l'étrange M. Boudemaghe jouait en même temps les utilités pour le parrain et le passeur de fonds pour Alexan­dre Guérini. Les investigations financières conduites en Suisse et au Luxembourg mettent en lumière le rôle joué par l'intermédiaire pour le compte de Gué­rini. Les sociétés de ce dernier, SMA Environnement et SMA Développement, qui exploitent en son nom les décharges de La Ciotat et de La Fare-les-Oliviers, sont contrôlées par deux autres immatriculées au Luxembourg, elles-mêmes détenues par une société écran panaméenne, Satellite Astro Corporation, dont l'ayant-droit était Boudemaghe lui-même...
"Les surveillances menées jusqu'à ce jour permettent d'affirmer que le véritable dirigeant de ces sociétés est Alexandre Guerini, frère du président du conseil général des Bouches-du-Rhône", écrivait à ce propos en 2010 le juge Duchaine dans une commission rogatoire adres­sée aux autorités luxembourgeoises.
guerini phrases lepoint - Copie (2)De fait, la filière franco-luxembourgeoise d'Alexan­dre Guerini semble avoir permis d'expatrier, sous couvert de "dividendes", plusieurs millions d'euros vers des banques étrangères. Or la justice considère que ces fonds provenaient de "détournements". En effet, l'enquête a dévoilé de nombreuses surfactura­tions, grâce auxquelles ses décharges augmentaient clandestinement leur chiffre d'affaires - ce qu'Alexan­dre Guérini a toutefois nié avec constance devant le juge d'instruction.
Homme de paille, homme de main, homme de confiance : Patrick Boudemaghe était tout cela à la fois. En scrutant les mails qu'il échangeait avec ses correspondants, les enquêteurs ont découvert des documents d'ouvertures de sociétés et de comptes à Hongkong, Panama et aux Etats-Unis. Ils ont aussi relevé la présence, parmi ses interlocuteurs, d'un haut dirigeant du groupe ibérique Urbaser, José Maria Lo­pez Pino. Pourguoi l'intermédiaire de Guérini trai­tait-il en direct avec un industriel espagnol ? Précision essentielle : c'est au groupe Urbaser qu'ont été confiées la construction et l'exploitation de l'incinérateur de Fos-sur-Mer destiné à traiter l'essentiel des déchets de l'agglomération marseillaise. Sollicité par Le Point, l'avocat de Boudemaghe, Luc Febbraro, n'a pas pu expliquer la raison de ce contact - ni a fortiori l'intêrêt éventuel de son client pour le marché de l'inciné­rateur. "C'est un homme intelligent et qui a beaucoup de relations", a-t-il simplement indiqué.
Il n'empêche, cette intrigante trouvaille ramène les pistes de l'affaire jusqu'à la politique. Avant les élections municipales de 2008, l'incinérateur de Fos fut l'un des enjeux principaux de l'affrontement entre Jean-Claude Gaudin, maire (UMP) de Marseille, et son challenger socialiste, Jean-Noël Guerini. Le premier, qui présidait aussi la communaué urbaine, avait lancé le projet. Le second y était opposé. Durant la campagne, Guérini était allé jusqu'à promettre l'arrêt des travaux et un referendum sur le sujet.
Revirement.
Au lendemain des municipales - qu'il a perdues d'un cheveu -, l'élu socialiste s'est trouvé en mesure de tout arrêter : contre toute attente, la gauche (pourtant minoritaire) avait raflé la prési­dence de la communauté urbaine, promise au dau­phin de Gaudin, le député Renaud Muselier, en pointe dans le combat contre le "système Guérini". Mais le feu rouge attendu n'est jamais venu.
Les élus de Fos et des communes environnantes ont eu beau crier à la trahison, la communauté ur­baine a validé le projet d'Urbaser en février 2009. En vassal docile, son président, Eugène Caselli, exécu­tait encore les ordres de Jean-Noël Guérini - il a rompu avec lui depuis en témoignant devant la jus­tice. Surtout, un "audit d'expertise environnementale et juridique" rendu au même moment préconisait la poursuite des travaux. L'étude fut réalisée sous l'égide d'un avocat parisien qui est aussi l'ami d'Alexandre Guerini et le conseil de ses sociétés...
En outre, tous les témoignages soulignent le rôle d'un autre proche des frères Guerini dans ce revire­ment : Jean-Marc Nabitz, ancien ingénieur porté à la tête d'une société d'économie mixte du conseil général et qui avait officieusement auprès d'eux la haute main sur la question du traitement des déchets. Curieusement, son nom figure sur les documents bancaires saisis au Luxembourg : il est l'ayant-droit d'une des sociétés gigognes de la galaxie Guérini au Panama. Pour l'heure, le juge n'a pas pu l'interroger : il a quitté Marseille à Noël 2009 et n'y est pas revenu. Sa boîte aux lettres est régulièrement vidée et ses amis le disent réfugié en Israël "pour fuir la pression". On se demande bien laquelle.

Le Tribunal saisi du cas de Christiane Argy :
http://www.laprovence.com/article/economie-a-la-une/marseille-le-tribunal-saisi-du-cas-de-madame-argy
La garde à vue de Jean-François Noyes :
http://www.laprovence.com/actu/region-en-direct/affaire-alexandre-guerini-un-conseiller-general-ps-entendu-par-les-gendarmes

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Commentaires
A
Qui pourrait au PS accepter de devenir candidat à la présidentielle avec des voies portées par la Pègre ?<br /> <br /> Qui des élus du CG13 ayant reconduit JNG à sa présidence pourrait encore se targuer d'avoir les mains propres ? voire la conscience tranquille ?<br /> <br /> Plus le temps passe, plus les dégâts seront considérables !
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E
Quel est ce silence assourdissant des socialistes face à cette affaire : s'ils étaient si démocrates que ça, une levée de bouclier aurait eu lieu et devant tant de faisceaux de soupçons, JN GUERINI devrait, à minima, se voir suspendu de ses fonctions, lui qui nous fait passer auprès de l'ensemble de la France pour des rigolos, nous les gens du Sud ! Ont ils si tort que çà !?
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