Comptes d'Aix : Les mauvais contes de Joissains (3)
Le rôle de la Chambre régionale et territoriale des comptes est de contrôler l'usage de l'argent public. Les deux rapports récemment rendus publics ne dérogent pas à ce principe. En cela, rien d'anormal à ce que les magistrats établissent un état des lieux, présentent une analyse et, le cas échéant, émettent des recommandations.
Cette démarche s'abstient de tout commentaire politique pour rester dans le domaine neutre et objectif d'une enquête à caractère administratif et juridique. La Chambre relève cependant des dysfonctionnements et des manquements à la loi qui valent, d'une certaine manière, appréciation sur la conduite des affaires d'une collectivité.
Ainsi, lorsque le rapport fait état "d'une situation financière de la commune d'Aix globalement satisfaisante au regard des principaux ratios pour lesquels les seuils d'alerte ne sont pas atteints", elle prononce un avis qui découle des chiffres.
Maryse Joissains, comme l'aurait fait n'importe quel maire, n'en retient aussitôt que la conclusion politique que la Ville est bien gérée et que son adjoint aux finances est un as. C'est de bonne guerre.
Mais cela faisant, elle tente d'occulter d'autres observations, il est vrai de facture moins joyeuse pour elle et toute son équipe. A savoir, une série de signaux fondés sur les mêmes analyses : "les finances communales se fragilisent", "les recettes augmentent moins rapidement que les dépenses. La capacité d'autofinancement se réduit et les marges de manœuvre de la collectivité s'amenuisent. Le volume annuel des dépenses d'équipement demeurent inférieures à la moyenne des communes de même catégorie".
La conclusion politique revient à dire que la municipalité semble se satisfaire d'une gestion purement comptable sans se donner les moyens de mettre
en œuvre des budgets dynamiques au service d'un développement ambitieux de
la ville.
Une politique du surplace…
Etant intervenu chaque année lors des séances budgétaires au conseil municipal, j'ai souvent fait observer la montée des charges de fonctionnement au détriment des besoins de l'investissement qui manque de projets structurants faisant appel à des cofinancements plutôt qu'aux seules ressources piochées dans les caisses de la Ville.
C'est ce qui m'a souvent amené à critiquer ce type de gestion et à l'assimiler à du surplace. Car agir utilement, c'est privilégier l'idée de choix politiques volontaristes qui seuls doivent guider une municipalité.
Un peu plus loin, la Chambre des comptes indique que les budgets se caractérisent par une augmentation quasi constante des charges de personnel. Et ajoute que cela est dû essentiellement à deux causes : d'une part, une progression de recrutements alors que des centaines d'agents sont passés de la Ville d'Aix à la Communauté du Pays d'Aix pour y exercer les diverses compétences transférées (les obligatoires mais aussi une profusion de facultatives pas toujours justifiées), d'autre part, un régime indemnitaire (en gros, les primes) qui montre des carences dans la maîtrise des heures supplémentaires.
Selon moi, pour les recrutements, il ne s'agit plus ici de rigueur de gestion mais d'un ensemble de dérives qui semblent bien viser à s'assurer la fidélisation d'un certain nombre de personnes, sinon à en caser quelques-unes, en contrepartie de services rendus ou à rendre. Je m'abstiendrai de citer des noms, car ce qui est critiquable, ce ne sont pas les individus mais cette pratique du pouvoir.
Pour compléter ce tableau, il convient de souligner les frais en procès délirants engagés avec tapage, et souvent perdus, par Maryse Joissains. Ce
qui n'a pas échappé à la Chambre : "On relève aussi une hausse conséquente des dépenses liées aux frais d'honoraires et contentieux."
Coûteux et peu rigoureux…
Un autre domaine dont la Chambre a relevé l'incongruité est celui du dispositif V'Hello. Comme je l'avais souligné en son temps, l'appel d'offres unique aurait dû faire l'objet de deux marchés distincts : l'un pour les vélos, l'autre pour le mobilier urbain.
En regroupant les deux, la municipalité a ainsi réduit la mise en concurrence à la seule candidature susceptible d'y répondre sous cette forme, JC Decaux. Ce qui en résulta sans surprise. L'os, c'est que la Chambre pointe à son tour la mauvaise affaire faite par la Ville : "Une meilleure analyse des besoins avec une mise en concurrence séparée du marché de mobilier urbain aurait sans doute permis de mettre en place un dispositif mieux adapté et moins coûteux".
Enfin, même s'ils n'y dédient qu'une page, les magistrats stigmatisent les conditions d'attribution des subventions aux associations : manque de clarté dans la politique associative, voire absence de contrôle rigoureux des
dossiers présentés par les associations, disparités flagrantes entre le petit nombre d'associations qui reçoivent beaucoup et la très large majorité de celles qui reçoivent peu.
A titre d'exemple, qui en vaut bien d'autres, je ne peux m'empêcher de rappeler le scandale qu'ont constitué le fiasco et la liquidation fort coûteuse du CECDC (Centre européen de création et de développement culturel), implanté au Jas de Bouffan, que j'ai dénoncé dès sa création comme étant une structure artificielle et opaque inévitablement vouée à l'échec.
Tels sont les quelques commentaires politiques que je désirais développer ici avant d'examiner le second rapport portant sur la gestion de la CPA.
A suivre…
Lire les deux premiers articles aux dates de lundi et mardi.