Suite à la décision du conseil municipal d'Aix de voter la révision partielle de POS, la Fédération des CIQ a adressé une lettre à Maryse Joissains. La Provence en a publié des extraits. Dans ce courrier, reproduit ici in extenso, le président demande au maire de renoncer à cette révision et d'envisager avec les porteurs du dossier un Plan B crédible. Les arguments sérieux ne manquent pas et méritent d'être lus dans leur totalité.
Ce samedi, sur place, en pleine zone boisée, des riverains ont surpris un abattage en nombre d'arbres parfaitement sains ! Que se passe-t-il donc ? Pourquoi une telle démarche de déforestation a-t-elle été entamée ? Il va falloir qu'on nous en donne les raisons. (Aux dernières nouvelles, il s'agirait d'un débroussaillement saisonnier entrepris par les services de la CPA dans le cadre de l'entretien forestier. Mais on peut se demander pourquoi on touche à tant d'arbres sains...)
La lettre de la Fédération des CIQ
Madame le Député-Maire, Vous avez fait voter lors du conseil municipal du 3 novembre la révision simplifiée du POS concernant le secteur des Bornes au Pont de l‘Arc.
Nous avons suivi de près, comme vous le savez, cette procédure de révision, visant à rendre constructibles des parcelles pour permettre le transfert de la Clinique du Parc Rambot.
Nos adhérents, en particulier les Comités de quartiers du Sud de la ville et ceux de Luynes, ont participé aux réunions d’information organisées par votre adjoint à l’urbanisme au début de l‘été, concernant cette procédure, et plus généralement les conditions dans lesquelles votre municipalité envisage d’opérer le transfert de la Clinique.
Ils se sont exprimés, comme nous-mêmes, dans le cadre de l’enquête publique, dont nous avons estimé les conclusions, comme de nombreux observateurs, peu fidèles à la majorité des points de vue recueillis et trop complaisantes vis-à-vis des insuffisances du dossier.
Nous avons été nombreux enfin à entendre, le 21 octobre dernier, les explications et les commentaires de Messieurs Gallèse et Chevalier, ainsi que le point de vue du Docteur Lacoste, sur ce dossier.
Notre Fédération, en se livrant de façon approfondie à l’examen de ce dossier, en écoutant attentivement tous les protagonistes (en particulier le Docteur Lacoste), en jouant un rôle extrêmement modérateur entre les différents points de vue, ainsi que dans la communication publique et privée sur ce dossier, s’est montrée responsable et soucieuse de concertation.
Nous soulignons que avons eu plusieurs fois l’occasion dès le début de cette procédure, de donner un avis très positif sur le changement d’implantation de cette Clinique, beaucoup trop à l’étroit dans ses locaux actuels, et générant un afflux de circulation et de stationnement sauvage dans les proches quartiers Est, déjà sujets à une apoplexie automobile permanente.
Malgré notre préjugé favorable de départ sur ce transfert, et notre examen attentif des arguments des porteurs du projet, nous devons dire à notre grand regret que les informations et commentaires qui nous ont été servis ne nous ont pas convaincus de la pertinence du choix de cette nouvelle implantation, au regard à la fois de l’intérêt des Aixois et des habitants du Pays d‘Aix, de celui de la Ville, et même de celui, bien compris, des médecins maîtres d’ouvrage du projet.
Nous allons résumer brièvement les points sur lesquels porte notre désaccord de fond sur l’implantation sur le secteur des Bornes.
Accessibilité et déplacements
Vos adjoints, et le Docteur Lacoste, le reconnaissent bien volontiers : l’accessibilité de jour, en particulier en cas d’urgence, depuis l’échangeur de Pont de l’Arc pose un problème majeur, dans un secteur de surcharge permanente de la circulation automobile, et qui, du fait du renforcement de la présence de l’Université dans le Sud de la Ville (dont nous nous réjouissons, bien entendu), du fait de l’implantation de parkings pour les étudiants au Sud de l’autoroute A8 (que nous appelons de tous nos vœux), et du fait enfin de tous les programmes immobiliers en projet à l’Est et à l’Ouest du Pont de l’Arc, va connaître un accroissement spectaculaire, malgré les efforts parallèles de la Ville et de la CPA pour développer les transports en commun.
L’échangeur du Pont de l’Arc est de surcroît mal tracé, trop proche des zones habitées ou de commerces, et "autobloquant" à de nombreuses heures de la journée !
Ce problème est tellement embarrassant que votre adjoint à l’urbanisme a recherché la possibilité de créer un accès pour la future clinique depuis la RD9, au voisinage du débouché du chemin de la Blaque, au travers de quelques propriétés privées, dont celle de la Félicité, et annoncé la création d‘un pont sur l‘Arc au voisinage de la Parade.
Malgré nos préventions, toutes rationnelles, contre le projet du secteur des Bornes, nous aurions pu éventuellement nous laisser convaincre par cette proposition.
Malheureusement, cet élément du dossier ne repose que sur des hypothèses peu crédibles : maîtrise foncière des terrains d’assiette (dont nous savons qu’elle est mal engagée), financement de cette acquisition et des travaux de construction de cette voie, planning de réalisation et financement du pont sur l’Arc, et des voies d’accès correspondantes Nord et Sud.
Par ailleurs, un débouché sur la RD9, déjà très chargée, ne représente pas un "développement durable" !
Et cette solution ne prend pas en compte suffisamment la nécessité pour cet équipement privé, mais à vocation de service public, d’être accessible le plus rapidement possible à toute la population du Pays d’Aix, et pas seulement aux habitants du centre ville.
Il nous semble par comparaison que la solution d’une implantation sur la future Zac de Lenfant n’a pas été sérieusement étudiée, l’échangeur des Trois Pigeons étant incomparablement moins chargé que celui de Pont de l’Arc : on ne nous oppose, lorsque nous évoquons cette solution, que des arguments de type "psychologique" (présence de la Maison d’arrêt) ou esthétique (présence de bâtiments tertiaires ou industriels).
La proximité de la future gare routière du plan d’Aillane desservant tout le Pays d’Aix, par exemple, qui nous paraît un avantage décisif concernant les problèmes de circulation et d‘accessibilité, n‘est absolument pas prise en compte.
(Clic sur l'image pour agrandir)
Des riverains ont découvert que l'on abattait déjà des arbres sur le site (Photo MC)
Aspects économiques
Pour compléter notre argument sur les problèmes de déplacements dans le secteur choisi, il faut ajouter que le coût financier de la voie décrite plus haut est entièrement à la charge de la collectivité. Même s’il est normal que la Ville se préoccupe de la réussite sanitaire, sociale et économique de ce projet de transfert, il paraîtrait pour le moins étrange que la Ville (comme d’autres collectivités locales) supporte le coût de cet investissement, dans une zone naturelle et inconstructible !
Ce surcoût pour la collectivité est d’autant plus malvenu que des solutions alternatives, comme celle d’une implantation sur la future Zac de Lenfant, éviterait cette charge supplémentaire.
Il est également incongru lorsque l’on connaît le nombre de projets urgents d’améliorations et de renforcements de voirie dont notre Ville a besoin dans le même temps.
Remarquons au passage, également, que les coûts d’aménagement intérieurs à la parcelle construite, à la charge des maîtres d’ouvrage, seront beaucoup plus importants sur le terrain du secteur des Bornes (avec toutes les précautions environnementales promises, le coût d’un parking sur une surface accidentée, et la construction d‘un rond-point extérieur) que dans une parcelle en Zac, plate et desservie par les réseaux en bordure de terrain.
Droit de l’urbanisme et environnement
Nous ne reviendrons pas sur nos critiques de fond, concernant une urbanisation rampante dans un secteur constituant la coupure naturelle entre la Ville et le village de Luynes, et contraire à la lettre comme à l’esprit de la loi SRU : nous les avons largement développés dans notre contribution à l’enquête publique, dont nous avons adressé copie à M. Gallèse, adjoint à l’urbanisme, mais ils ont été étrangement ignorés par le Commissaire enquêteur dans son rapport !
Nous redirons seulement aujourd’hui qu’en contrepartie d’un environnement "vendeur", qui semble avoir séduit l’équipe des maîtres d’ouvrage de la Clinique, et ses futurs investisseurs, le terrain du secteur des Bornes sera profondément terrassé et remanié, dans un secteur réputé partiellement ou totalement inconstructible.
Le parking de 800 places qui est envisagé aura beau être "paysagé", il créera une importante imperméabilisation du sol, et générera une pollution automobile importante dans un lieu naturel et protégé.
Ces interventions sur une zone à vocation naturelle et agricole sont en contradiction flagrante avec les principes de la Loi SRU, que Messieurs Gallèse et Serre se flattent par ailleurs de respecter dans l’élaboration du futur PLU.
Par ailleurs, une question paraît avoir été occultée : c’est celle de l’assainissement des eaux usées. Aucune station d’épuration ne semble avoir été prévue.
Enfin, signalons un petit tour de "passe-passe" juridique (suppression d’une zone UD1.1, permettant la construction de maisons, et annexion de cette zone au projet de clinique, sous forme de logements de fonction) qui permet au projet d’être plus politiquement correct, tout en gardant les mêmes surfaces construites !
D’une façon plus globale, nous constatons qu’en se focalisant sur le seul secteur des Bornes pour réaliser le transfert de la Clinique Rambot, le maître d’ouvrage et la Ville se placent volontairement dans un contexte d’insécurité juridique qui risque d’affecter pour de longs mois la planification de ce transfert et sa réalisation.
Cette insécurité juridique résulte d’un manque de concertation en amont du projet, dévoilé comme trop souvent au public alors que tout est déjà "ficelé".
Nous reconnaissons que les élus chargés du dossier se sont énormément mobilisés pour le faire aboutir, dans un louable souci d’information, mais faute de convaincre en amont les nombreux intervenants au projet, cette affaire risque d’entraîner blocages, oppositions, surcoûts et confusion.
Nous vous demandons donc instamment, puisqu’il en est encore temps, de renoncer à cette révision du POS, et d’envisager avec les porteurs du dossier, un "Plan B" crédible.
Nous connaissons votre réalisme politique, et nous savons que vous examinerez nos arguments avec la plus grande attention.
Nous vous prions d’agréer, Madame le Député-Maire, l’expression de notre considération distinguée.
Le Président