Un citoyen aixois, que je remercie de m'autoriser à publier, m'a fait parvenir cette analyse que je trouve très intéressante. Il s'est penché sur les résultats enregistrés dans les bureaux de vote ce mois de juillet et les a comparés à ceux de 2001 qui présentaient le même type de confrontation, à savoir un duel au second tour.
Medvedowsky et Joissains (dessins de Trax et Ch. Lopez dans "Le Ravi")
Les duels électoraux à Aix-en-Provence :
Petite analyse comparative 2001-2009
Une première analyse, globale et rapide, des résultats des élections de juillet 2009 à Aix peut conduire à une analyse erronée de l’évolution de l’électorat du 1er au 2e tour. En effet, avec 43.972 votants au 2e tour contre 39.199 au 1er tour, on dénombre bien près de 5.000 votants supplémentaires. La liste Medvedowsky-De Peretti-Guerrera a bien obtenu 21.430 voix au 2e tour, tout près de la somme des 21.917 voix recueillies par les 4 listes qui ont appelé à voter contre Maryse Joissains au 2e tour. Et certains ont pu en déduire qu'Alexandre Medvedowsky et François-Xavier De Peretti avaient "rassemblé" et que la victoire, étroite (187 voix) de Joissains était due aux 5.000 électeurs supplémentaires du 2e tour (en laissant sous-entendre qu’il y avait eu tripatouillage en particulier grâce aux 4.000 procurations) ; laissons les juges apprécier.
Mais l’analyse est bien trop sommaire : reprenons-la en analysant les résultats de chaque bureau de vote entre les 2 tours et en les comparant aux résultats de l’élection de 2001 qui fut, comme en 2009, un duel entre Maryse Joissains et une tête de liste de Gauche : Jean-François Picheral en 2001, Alexandre Medvedowsky en 2009. Cette comparaison est plus judicieuse que le parallèle avec les dernières élections européennes qui sont d’une autre nature.
1ère observation : au 2e tour de 2009 ont été comptabilisés 925 bulletins blancs ou nuls, soit 2,5%, sans oublier les nombreux électeurs du 1er tour qui n’ont pas voté au 2e, ainsi que les assesseurs ont pu le constater sur les listes d’émargement. On peut en déduire, ces chiffres paraissant plus importants dans les bureaux où Nathalie Leconte a fait ses meilleurs scores, qu’une partie des électeurs de l’extrême-gauche n’a pas voté au 2e tour pour Medvedowsky.
2e observation : l’analyse comparative, bureau par bureau, indique clairement qu’au moins 50% des voix de Stéphane Salord sont allées à Joissains dans tous les bureaux de vote : ce qui est logique sociologiquement et politiquement.
3e observation : même dans les bureaux où Salord a été très faible au 1er tour, on constate une déperdition supplémentaire de 3 ou 4% des voix écologistes vers Joissains. Ceci permet de déterminer un indice de report au 2e tour des voix vers la liste Joissains qui calcule le % approximatif des électeurs de Salord (au-dessus de 50% de son total du 1er tour) additionnés aux électeurs de Guerrera qui se sont reportés au 2e tour sur Joissains. Cet indice varie de -2,4 à +7,7% selon les bureaux.
En dressant la carte, par bureaux, des votes Medvedowsky et Joissains au 2e tour et de Picheral au 2e tour de 2001, on constate une accentuation du divorce politique et sociologique dans la ville d’Aix : 39 bureaux ont donné la majorité à Medvedowsky et 47 à Joissains.
L’électorat majoritaire de la liste Medvedowsky accentue encore la concentration déjà observée en 2001 :
Ÿ un petit noyau, traditionnellement à gauche, au cœur de la vieille ville : bureaux 1, 2, 3, 6, 83.
Ÿ un fort noyau de 6 bureaux dans les quartiers populaires des immeubles des quartiers Nord et Nord-Est, avec de fortes progressions par rapport aux résultats de Picheral en 2001 : +12% à Beisson, +8% à Jules-Isaac, +16% à la Pinette.
Ÿ un très fort noyau homogène, de 17 bureaux, des quartiers Ouest (Encagnane et Jas-de-Bouffan) où pas un bureau n’a voté majoritairement pour Joissains ! Plusieurs bureaux ont été gagnés par Medvedowsky par rapport au vote pour Picheral de 2001, avec des taux de progression moyens ou importants (+14% au bureau 17),
Ÿ enfin une couronne de 5 bureaux des quartiers Sud de la ville, depuis le bureau 38 du Val St-André jusqu’au Pigonnet et au Pont de l’Arc où l’électorat de Medvedowsky a progressé de 1 à 6%, surtout aux Fenouillères et au Pigonnet : ce rejet de Joissains dans ces quartiers est peut-être lié à la gare routière, au Plan Campus et au projet de clinique au Montaiguet ?
Ÿ 2 bureaux aux Milles et 2 sur le plateau de Puyricard complètent ces fiefs de la liste Medvedowsky, avec une progression notable de 9 points au bureau 42.
Par contre, la liste Medvedowsky 2009 a perdu de nombreux bureaux, et en %, au profit de Joissains dans tous les autres quartiers de la ville (47 bureaux) :
Ÿ les quartiers résidentiels de l’Ouest et du Nord, y compris les Granettes (-7%),
Ÿ les quartiers résidentiels de l’Est, dont la Torse,
Ÿ les quartiers Sud et Est du centre-ville dont une partie du Pigonnet qui votait Picheral,
Ÿ les villages de Luynes, de Couteron, 4 bureaux sur 6 des Milles et 6 bureaux sur 8 du plateau de Celony-Puyricard.
D’ailleurs, c’est dans ces bureaux où Joissains a obtenu la majorité au 2e tour qu’on trouve les indices maxima de report de voix de Salord-Guerrera (avec des maxima de 4,8 à 7 aux Granettes, au Rocher du Dragon, à Puyricard, cours des Alpes, Beauregard, la Chartreuse, Prêcheurs, Jules-Ferry, Salliers, rue de la Molle et aux bureaux 65 et 80 des Milles), ce qui signifie une meilleure mobilisation de l’électorat Joissains dans les quartiers traditionnellement à droite. Ainsi, l’influence des 5.000 votants supplémentaires du 2e tour ne doit pas être négligée mais, étant très proche entre tous les bureaux (différence de 1,5% maximum), on ne peut que constater que les nouveaux électeurs se sont répartis entre les 2 listes candidates du 2e tour.
En conclusion, le scrutin municipal de juillet 2009 démontre à nouveau la coupure sociologique, territoriale et politique de la ville d’Aix qui reste majoritairement à droite. Certes, la droite a reculé par rapport aux élections législatives, de 57 à 50%, mais le rejet de Joissains n’est pas suffisant pour permettre à l’opposition de dépasser la barre des 50%.
La gauche aixoise reste à son étiage de 42-43%, obtenu par Medvedowsky au 2e tour de 2008. L’apport du MoDem, avec De Peretti, n’a pas dépassé les 7-8% déjà obtenus aux élections européennes. Et les voix de la vengeance de Salord sont restées marginales.
Le résultat est, pour l’opposition, plus mauvais que celui de Picheral en 2001, dernier duel comparable, puisque Picheral avait réalisé 49,5% lorsque De Peretti et Salord avaient noué leur alliance avec Joissains ! Ce scrutin montre aussi que l’électorat écologiste ne vote pas totalement à gauche, ce dont on se doutait après leurs 21% aux élections européennes.
L’alliance entre le PS, le MoDem et les écologistes au 2e tour 2009 aurait dû être gagnante, et elle peut l’être pour l’avenir ; encore faudrait-il qu’elle ait à sa tête, comme l’étaient Ciccolini, Philibert ou Picheral, un homme ou une femme capable de rassembler tous les socialistes et toute la gauche et inspirant confiance par son projet et son image aux centristes et aux républicains de progrès qui sont nécessaires pour dégager à Aix une majorité nouvelle. Puissent le PS et la Gauche en tirer les leçons et les conclusions qui s’imposent s’ils veulent emporter à nouveau la confiance et l’espoir d’une majorité d’Aixois.
(Auteur : Pierre DARLES, 22 juillet 2009)