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le Blog de Lucien-Alex@ndre CASTRONOVO
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  • Prof d'anglais retraité Sous-officier Armée de l'Air Président assos culture, éducation, social 1978-1989 Correspondant presse locale 1989-1995 Conseiller municipal liste Yves Kleniec 1983-1989 Adjoint liste Jean-François Picheral 1995-2001 Parti radical de gauche 1998-2008 Conseiller municipal liste Michel Pezet 2001-2009 Conseiller municipal liste Edouard Baldo 2014-2020 lucalexcas@aol.com
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18 janvier 2008

BILAN 20 : Maryse Joissains et la laïcité

Copie_de_Joissains

Dessin du mensuel satirique "Le Ravi"

Des faits, rien que des faits

La laïcité est plus que jamais à l'ordre du jour. Nicolas Sarkozy multiplie les déclarations et se prend les pieds dans le tapis. Lire à ce sujet, l'excellent article "Les cinq fautes du président..." par Henri Pena-Ruiz, ci-dessous.

A Aix, Maryse Joissains n'en est pas à une dérive près non plus. La France n'est pas les Etats-Unis. Cela fait plus de 100 ans que notre pays a établi les règles de séparation de l'Eglise et de l'Etat.

On ne peut pas ne pas le remarquer, le maire d'Aix porte en permanence une énorme croix de 7 cm bien visible sur sa poitrine. "C'est parce que c'est esthétique", se justifie-t-elle. Et pourquoi pas, pour faire bonne mesure et aller au bout de cette "logique", compléter son goût pour les belles choses par un bouquet comprenant l'étoile de David, la main de Fathma et un Bouddha, par exemple.

En 2004, elle s'est présentée ornée de cette croix à une réunion publique à l'Hôtel de Ville organisée par l'Observatoire de la laïcité du Pays d'Aix, choquant l'assistance qui lui a posé la question, à laquelle elle a rétorqué comme dit ci-dessus.

Le 8-Mai 2005, en tant que maire, Maryse Joissains a validé un carton officiel municipal pour les cérémonies de la Victoire en précisant bien dans les horaires des manifestations que nous étions "invités à participer à la messe présidée par l'archevêque d'Aix".

Pour la mort du pape, le drapeau français a été mis en berne au fronton de l'Hôtel de Ville pendant une semaine, soit sept fois plus longtemps que ce que préconisait le Préfet.

A la cérémonie des vœux de 2006, elle a remercié publiquement, devant le sous-préfet, les députés, l'inspecteur d'académie, toutes les autorités civiles, militaires et le public, "tous les cultes qui ont dit des prières à l'intention de ma fille atteinte d'une grave maladie", situation qui relève par nature de l'ordre privé.

Au conseil municipal du 31 janvier 2006, elle a proposé de dénommer, sans motivation sérieuse, une minuscule rue "Saint-Georges", débordant ainsi du cadre laïque et neutre en se prononçant pour une dénomination religieuse.

Dans le n° 23 du magazine municipal "Aix en dialogue", un article de la rubrique villages a fait la promotion des activités de l'église en incitant les enfants à aller au catéchisme. Faut-il le rappeler, cela relève également de choix personnels.

Enfin, au conseil municipal du 15 janvier 2007, Maryse Joissains a proposé de dénommer un rond-point "Père Pierre Aguesse" – que j'ai bien connu dans ses activités sociales et son implication dans la vie du Jas de Bouffan et auquel j'ai rendu hommage. J'ai demandé que l'on supprime un membre de phrase en forme de commentaire dans la délibération parce que cela me paraissait outrepasser les prérogatives de notre assemblée communale : "Pierre Aguesse a montré que l'église catholique a sa place dans notre société pour le bien de tous, quelle que soit leur origine sociale pour cette population aux origines multiples."

Pour éviter toute équivoque, je tiens à préciser que je respecte toutes les croyances et toutes les personnes qui choisissent ou pratiquent leurs religions. La France permet l'expression de toutes les confessions, librement, et c'est heureux. Mais vivre ensemble ne signifie pas pour autant transgresser les principes qui fondent notre République laïque ou prendre position en faveur de telle ou telle option religieuse, a fortiori quand on détient un mandat électif ou qu'on représente l'Etat.

             

Lecteur

Les cinq fautes du président…

Ci-après l'article paru dans Le Figaro le 3 janvier 2007, par Henri Pena-Ruiz, philosophe, professeur, écrivain, ancien membre de la commission Stasi sur l'application du principe de laïcité dans la République.

Derniers ouvrages parus : Qu'est-ce que la laïcité ? (Gallimard) et Leçons sur le bonheur (Flammarion).

   Nicolas Sarkozy a prononcé au Vatican, un discours choquant à plus d'un titre. Soutenir, en somme, que la religion mérite un privilège public car elle seule ouvrirait sur le sens profond de la vie humaine est une profession de foi discriminatoire. Il est regrettable qu'à un tel niveau de responsabilité cinq fautes majeures se conjuguent ainsi.

Une faute morale d'abord.

   Lisons : "Ceux qui ne croient pas doivent être protégés de toute forme d'intolérance et de prosélytisme. Mais un homme qui croit, c'est un homme qui espère. Et l'intérêt de la République, c'est qu'il y ait beaucoup d'hommes et de femmes qui espèrent." Dénier implicitement l'espérance aux humanistes athées est inadmissible.

   C'est montrer bien peu de respect pour ceux qui fondent leur dévouement pour la solidarité ou la justice sur un humanisme sans référence divine. Ils seront nombreux en France à se sentir blessés par de tels propos. Était-ce bien la peine de rendre hommage au jeune communiste athée Guy Môquet pour ainsi le disqualifier ensuite en lui déniant toute espérance et toute visée du sens ?

   En fait, monsieur le président, vous réduisez indûment la spiritualité à la religion, et la transcendance à la transcendance religieuse. Un jeune héros de la Résistance transcende la peur de mourir pour défendre la liberté, comme le firent tant d'humanistes athées à côté de croyants résistants.

Une faute politique.

   Tout se passe comme si M. Sarkozy était incapable de distinguer ses convictions personnelles de ce qui lui est permis de dire publiquement dans l'exercice de ses fonctions, celles d'un président de la République qui se doit de représenter tous les Français à égalité, sans discrimination ni privilège.

   Si un simple fonctionnaire, un professeur par exemple, commettait une telle confusion dans l'exercice de ses fonctions, il serait à juste titre rappelé au devoir de réserve. Il est regrettable que le chef de l'État ne donne pas l'exemple. Curieux oubli de la déontologie.

Une faute juridique.

   Dans un État de droit, il n'appartient pas aux tenants du pouvoir politique de hiérarchiser les options spirituelles, et de décerner un privilège à une certaine façon de concevoir la vie spirituelle ou l'accomplissement humain. Kant dénonçait le paternalisme des dirigeants politiques qui infantilisent le peuple en valorisant autoritairement une certaine façon de conduire sa vie et sa spiritualité. Des citoyens respectés sont assez grands pour savoir ce qu'ils ont à faire en la matière, et ils n'ont pas besoin de leçons de spiritualité conforme.

   Lisons à nouveau : "Dans la transmission des valeurs et dans l'apprentissage de la différence entre le bien et le mal, l'instituteur ne pourra jamais remplacer le curé ou le pasteur." On est surpris d'une telle hiérarchie éthique entre l'instituteur et le curé. L'école de la République a été inventée pour que les êtres humains puissent se passer de maître.

   Tel est l'honneur des instituteurs et des professeurs. Grâce à l'instruction, l'autonomie éthique de chaque personne se fonde sur son autonomie de jugement. Elle n'a donc pas à être jugée moins bonne que la direction de conscience exercée par des tuteurs moraux. Étrange spiritualité que celle qui veut assujettir la conscience à la croyance !

Une faute historique.

   L'éloge du christianisme comme fondement de civilisation passe sous silence les terribles réalités historiques qui remontent à l'époque où l'Église catholique disposait du pouvoir temporel, puisque le pouvoir politique des princes était alors conçu comme son "bras séculier". L'Occident chrétien peut-il s'enorgueillir du thème religieux du "peuple déicide" qui déboucha sur un antisémitisme particulièrement virulent là où l'Église était très puissante ?

   Les hérésies noyées dans le sang, les guerres de religion avec le massacre de la Saint-Barthélemy (3500 morts en un jour : autant que lors des attentats islamistes du 11 Septembre contre les Twin Towers), les croisades et les bûchers de l'Inquisition (Giordano Bruno brûlé vif en 1600 à Rome), l'Index Librorum Prohibitorum, censure de la culture humaine, l'anathématisation des droits de l'homme et de la liberté de conscience (syllabus de 1864) doivent-ils être oubliés ?

   Les racines de l'Europe ? L'héritage religieux est pour le moins ambigu… L'approche discriminatoire est évidente dès lors que le christianisme est invoqué sans référence aux atrocités mentionnées, alors que les idéaux des Lumières, de l'émancipation collective, et du communisme sont quant à eux stigmatisés à mots couverts au nom de réalités contestables qu'ils auraient engendrées.

   Pourquoi dans un cas délier le projet spirituel de l'histoire réelle, et dans l'autre procéder à l'amalgame ? Si Jésus n'est pas responsable de Torquemada, pourquoi Marx le serait-il de Staline ? De grâce, monsieur le président, ne réécrivez pas l'histoire à sens unique ! Comment par ailleurs osez-vous parler de la Loi de séparation de l'État et des Églises de 1905 comme d'une sorte de violence faite à la religion, alors qu'elle ne fit qu'émanciper l'État de l'Église et l'Église de l'État ?

   Abolir les privilèges publics des religions, c'est tout simplement rappeler que la foi religieuse ne doit engager que les croyants et eux seuls. Si la promotion de l'égalité est une violence, alors le triptyque républicain en est une. Quant aux droits de l'homme d'abord proclamés en Europe, ils proviennent de la théorie du droit naturel, elle-même inspirée de l'humanisme de la philosophie antique et notamment de l'universalisme stoïcien, et non du christianisme. Si on veut à tout prix évoquer les racines, il faut les citer toutes, et de façon équitable.

Une faute culturelle.

   Toute valorisation unilatérale d'une civilisation implicitement assimilée à une religion dominante risque de déboucher sur une logique de choc des civilisations et de guerre des dieux. Il n'est pas judicieux de revenir ainsi à une conception de la nation ou d'un groupe de nations qui exalterait un particularisme religieux, au lieu de mettre en valeur les conquêtes du droit, souvent à rebours des traditions religieuses.

   Comment des peuples ayant vécu avec des choix religieux différents peuvent-ils admettre un tel privilège pour ce qui n'est qu'un particularisme, alors que ce qui vaut dans un espace politique de droit c'est justement la portée universelle de conquêtes effectuées souvent dans le sang et les larmes ? Si l'Europe a une voix audible, ce n'est pas par la valorisation de ses racines religieuses, mais par celle de telles conquêtes.

   La liberté de conscience, l'égalité des droits, l'égalité des sexes, toujours en marche, signent non la supériorité d'une culture, mais la valeur exemplaire de luttes qui peuvent affranchir les cultures, à commencer par la culture dite occidentale, de leurs préjugés.

   Simone de Beauvoir rédigeant "Le Deuxième Sexe" pratiquait cette distanciation salutaire pour l'Occident chrétien. Taslima Nasreen fait de même au Bangladesh pour les théocraties islamistes. La culture, entendue comme émancipation du jugement, délivre ainsi des cultures, entendues comme traditions fermées.

   Assimiler l'individu à son groupe particulier, c'est lui faire courir le risque d'une soumission peu propice à sa liberté. Clouer les peuples à des identités collectives, religieuses ou autres, c'est les détourner de la recherche des droits universels, vecteurs de fraternité comme d'émancipation. Le danger du communautarisme n'est pas loin.

   La laïcité, sans adjectif, ni positive ni négative, ne saurait être défigurée par des propos sans fondements. Elle ne se réduit pas à la liberté de croire ou de ne pas croire accordée avec une certaine condescendance aux "non-croyants". Elle implique la plénitude de l'égalité de traitement, par la République et son président, des athées et des croyants.

   Cette égalité, à l'évidence, est la condition d'une véritable fraternité, dans la référence au bien commun, qui est de tous. Monsieur le président, le résistant catholique Honoré d'Estienne d'Orves et l'humaniste athée Guy Môquet, celui qui croyait au ciel et celui qui n'y croyait pas, ne méritent-ils pas même considération ?

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Commentaires
J
"C'est montrer bien peu de respect pour ceux qui fondent leur dévouement pour la solidarité ou la justice sur un humanisme sans référence divine."<br /> <br /> Pour ma part, je considère que la ligne de démarcation entre la droite droite et la gauche gauche passe par là...
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